dimanche 25 octobre 2009

Le 19 septembre dernier, une jeune musulmane a été victime d’une agression raciste à Pessac

Le 19 septembre dernier, une jeune musulmane a été victime d’une agression raciste à Pessac, frappée et insultée parce qu’elle portait un voile. Le Comité Action Palestine dénonce avec force cet acte islamophobe et s’est joint à l’appel à la manifestation du samedi 10 octobre.
Le Comité Action Palestine dénonce aussi avec virulence ce qui a rendu possible une telle lâcheté, qui la cautionne et la banalise, à savoir le climat d’islamophobie entretenu par les discours médiatiques des hommes politiques de cette Nation, par leurs pratiques anti-immigrés et les lois discriminatoires qu’ils font voter. Et il est d’une évidence criante que le pas est vite franchi entre l’interdiction du voile à l’école, l’interdiction du niqab dans la rue et l’agression d’une jeune musulmane.


La classe politique française, laïque et républicaine, use de tous les instants et de tous les stratagèmes pour implanter la haine anti-musulmane dans ce pays car elle y voit deux objectifs majeurs. La première fonction de ce racisme islamophobe est à usage interne. Elle marginalise une population économiquement précaire et donc susceptible d’être politiquement contestataire : il crée donc une scission blancs-immigrés profitable au maintien de l’ordre républicain-bourgeois. La deuxième fonction, à usage externe, de ce racisme, est de délégitimer tout mouvement de solidarité en France avec les peuples musulmans dans leur résistance contre les agressions coloniales et impérialistes. Il s’agit en particulier d’éviter, pour un Etat républicain pro-sioniste, que le mouvement pro-palestinien ne trouve un écho au sein de la population française.


Parmi les stratagèmes mis en oeuvre par la classe politique française pour développer l'islamophobie au sein de la population française, c’est sans doute l'utilisation de relais indigènes de cette propagande anti-musulmane qui est la plus dangereuse. C’est pourquoi le Comité Action Palestine attire particulièrement l’attention sur ces associations de composition indigène qui travaillent au service du pouvoir néocolonial français. L’association Ni putes ni soumises par exemple est une des filiales les plus emblématique de l’industrie islamophobe. Sa stratégie repose sur deux axes idéologiques simples. Il s’agit en premier lieu de stigmatiser les jeunes des quartiers populaires comme groupe fondamentalement sexiste pour les rendre haïssables aux yeux de la société française et renforcer leur isolement. En second lieu, l’objectif visé est de créer une division hommes-femmes dans les quartiers populaires, au sein même des foyers immigrés, pour affaiblir structurellement cette underclass politiquement dangereuse et, par la même occasion, de la détourner des vraies problématiques politiques. Il faut noter au passage que cette organisation a férocement milité pour l’adoption de la loi sur l’interdiction du voile à l'école en dénigrant les femmes islamistes, ces « soldates du fascisme vert » et pour libérer, malgré elles, les musulmanes de « l'oppression de voile », selon les propres expressions de Fadéla Amara (Le Parisien-21-09-03). A l'instar du Parti Socialiste, l'association Ni putes ni soumises enveloppe sous un discours libérateur et progressiste des positions des plus rétrogrades et réactionnaires qui soient.



Les autorités politiques françaises ont promu financièrement et médiatiquement cette organisation en adoptant la même stratégie qui conduisait en 1983 à la création de SOS racisme. SOS Racisme a été crée de toute pièce par le Parti Socialiste, à l'initiative de François Mitterrand et de Julien Dray, pour désamorcer le mouvement de la Marche pour l'égalité des jeunes issus de l'immigration. Dans le même temps, les cadres qui ont été placés à la tête de cette organisation sont issus pour la plupart de l'Union des étudiants juifs de France (UEJF) et sont connus pour leur sionisme. Pour le pouvoir, il fallait à tout prix empêcher que le mouvement des quartiers populaires ne fasse sienne la cause pro-palestinienne.



Que ce soit SOS Racisme, Ni putes ni soumises ou d'autres associations de moindre ampleur, les éléments issus des minorités immigrées à qui est confié ce travail de sous-traitance apportent une caution de non-racisme aux idéologies racistes et aux pratiques de l’Etat. Ils justifient directement ou indirectement les attaques en règle du pouvoir envers les populations immigrées des quartiers populaires. Taxer les musulmans de France de communautaristes, de fanatiques, de sexistes, de délinquants, de rétrogrades, de moyenâgeux, de sauvages ou de barbares, n’est-ce pas faciliter le travail de répression de l’Etat ? Et en retour, ce racisme d’Etat n’encourage-t-il pas les passages à l’acte, les crimes et les injures dont les musulmans sont la cible ?


Le comité Action Palestine recommande aussi une grande vigilance vis-à-vis de ces idéologues issus de l’immigration, tel Tarek Oubrou, qui derrière une phraséologie sophistiquée prônant une réforme de l’islam, font le jeu des institutions néocoloniales de la République. Il y a quelques années déjà, Tarek Oubrou proposait une « charia des minorités », c’est-à-dire une adaptation des pratiques musulmanes au contexte politique et juridique français, la possibilité de déroger à certaines prescriptions religieuses dans la mesure où elles ne cadrent pas avec le droit, les institutions, l'État français. Voilà ce qu’affirmait alors le recteur de la mosquée de Bordeaux : «J'informe la fille ou la femme qui risque l'expulsion de son établissement scolaire ou de son travail qu'elle a la dérogation de ne pas couvrir ses cheveux. » Mais, cette «dérogation n'est pas une abrogation. Au cas où elle insiste pour le porter, elle doit être soutenue dans son combat» (Libération-20 août 2002).Mais Tarek Oubrou pose délibérément le problème à l'envers et les perspectives et solutions qu'il propose doivent être questionnées : faut-il aménager et réformer des pratiques islamiques qui dérangent le pouvoir français ou faut-il critiquer et combattre des lois et des institutions qui discriminent et oppriment chaque jour davantage les populations musulmanes de France ? Il est évident que l’idéologue musulman a fait son choix, celui de la soumission et de la compromission avec une classe politique raciste et en cela il correspond exactement à la définition que donne Frantz Fanon de l’intellectuel colonisé, un intellectuel aliéné qui a fait siennes et intériorisé les demandes du dominant, un intellectuel qui veut parler le langage de l’occident en effaçant les stigmates liés à ses origines. En considérant le voile comme « une norme canonique
secondaire » et en recommandant aux femmes musulmanes de ne pas le porter, notre islamologue républicain ne cherche-t-il pas l’invisibilité de l’islam dans la société française ? Et le propre de toute idéologie raciste n’est-il pas de rendre invisible, de réduire au silence, de nier l’objet du racisme ?


Mais Tarek Oubrou ne s’est pas arrêté là, et ses dernières déclarations et manifestations sur la place publique trahissent une collusion grandissante avec des cercles d’intérêt qui ont peu de considération pour les musulmans. Ainsi dans un débat avec Hervé Rehby (président du centre Yavné), dans le cadre des Amitiés judéo-musulmanes de juin 2009, il semble accréditer la thèse de son contradicteur qui établit une corrélation historique entre la femme voilée et la prostituée. En effet, voilà ce qu’affirmait Hervé Rehby :


« Lors de l'une des toutes premières mentions du voile dans la Torah, il est écrit que la femme est "couverte à la manière des prostituées".Les femmes qui se prostituaient se voilaient pour préserver leur identité. » . Et ce que répondait Tarek Oubrou : « En effet, j'ai moi-même vu ça dans mon village : les femmes voilées, on savait qu'elles étaient prostituées, et qu'elles se protégeaient ainsi (…) On oublie trop souvent que dans le choix d'un habit, il y a une stratégie. » (Sud Ouest-27 juin 2009). Étant donné que l’intervention de Tarek Oubrou manque singulièrement de clarté, il est légitime de s'interroger sur son positionnement politique : pourquoi dans un contexte si difficile pour les musulmans, dans lequel toutes les arguties semblent bonnes pour justifier la loi inique contre le voile, participe-t-il de cet amalgame ignoble ? Pourquoi apporte-t-il de l’eau au moulin du CRIF et à tous ceux qui sont animés par la haine contre les musulmans ? Et pourquoi répond-il à l’invitation du CRIF quelques mois après l’agression sioniste à Gaza sachant que celui-ci avait manifesté pour apporter son soutien inconditionnel à l’armée israélienne ? Sachant aussi que les membres musulmans de l'Amitié judéo-musulmane avaient démissionné en bloc de cette instance lors des bombardements de Gaza ! Accepterait-t-il le colonialisme israélien comme il paraît si bien accepter le néocolonialisme français ?



D’interviews en conférences et de conférences en interviews, Tarek Oubrou a perdu ses garde-fous et milite pour une absorption-dilution de l’islam dans la république française à laquelle les dirigeants de ce pays n’auraient rien à redire. Autant en 2002, il insistait pour se battre aux côtés des femmes qui refuseraient d’enlever le voile -même s’il recommandait aux musulmanes de ne pas le porter- autant en 2009, un tel combat ne semble plus pour lui ni opportun ni d’actualité. Le slogan de Tarek Oubrou est désormais « mets ton foulard dans ta poche ». En effet, l’idéologue islamo-républicain ne considère plus le voile comme une obligation religieuse mais seulement « comme recommandation implicite qui correspond à une éthique de pudeur du moment coranique.



Pour autant, une femme qui ne le met pas ne commet pas de faute. Mais, aujourd'hui, la communauté musulmane est fragile, et s'attache à des adjuvants et à des normes. C'est aberrant de réduire une femme
musulmane à son foulard ; c'est de l'ignorance. Le foulard n'est pas un objet cultuel, encore moins un symbole de sacré. » (Le Monde-15-10-09). Le hijab n'est plus dans la bouche de Tarek Oubrou une obligation religieuse, même pas une prescription ! Ces propos sont pour le moins étonnants et de nouvelles questions s'imposent : est-ce une relecture savante du Coran qu'il nous propose là ou une accommodation au droit sacré de la République ? Et comment l'Union des organisations islamiques de France (UOIF), dont Tarek Oubrou est un membre influent, se positionne-t-elle vis-à-vis de ces déclarations ?
Le port du voile dans la société française a une signification politique qui lui échappe ou qu'il feint de ne pas voir, c’est une résistance face à une domination qui prend les formes de l’occidentalisation, c’est un combat quotidien contre l’acculturation imposée, contre la violence symbolique et physique des classes dirigeantes envers les immigrés issus des anciennes colonies et les musulmans en général. Et c’est un combat mondial contre la domination impérialiste qui est aussi une hégémonie culturelle !



Mais Tarek Oubrou joue à l’aveugle et veut aveugler le monde avec lui lorsqu’il déclare, péremptoire, que l’islamophobie n’existe pas en France : « Le racisme n'est pas une nouveauté, mais l'islamophobie présentée comme un fléau de notre société, je ne la vois pas. Je n'accepte pas cette position victimaire et cette posture de consommation de droits(…) En outre, l'islamophobie est parfois développée par des musulmans eux-mêmes qui, par leur comportement et leur visibilité, peuvent faire peur à nos concitoyens non musulmans. » (Le Monde-15-10-09). Il n’y aurait pas de fléau de l’islamophobie en France, pas de discrimination à l’embauche ni au logement, pas de monde carcéral où végètent un grande nombre de musulmans ni de justice à double vitesse, pas de violences policières ni de meurtres impunis, pas de réorientation massive des élèves musulmans vers les filières professionnelles, pas de récurrence des déclarations racistes des personnalités politiques, pas d’acharnement médiatique contre les jeunes issus de l’immigration, pas de lois discriminatoires envers les musulmans ni de reconduites quotidiennes à la frontière, pas même d’agressions racistes dans la rue. Alors si l’islamophobie est pure construction imaginaire, que faisait Tarek Oubrou au rassemblement du 10 octobre 2009 à Pessac dénonçant l’agression raciste par quatre individus d’une jeune musulmane ? Et il va jusqu’à prétendre que si l’islamophobie existe, c’est qu’elle est provoquée par les musulmans eux-mêmes. Alors faut-il supprimer les musulmans pour supprimer le racisme islamophobe ? C’est exactement le mode de pensée du raciste primaire. Il est maintenant évident que la classe politique et les islamophobes en tout genre ont trouvé en Tarek Oubrou un fidèle serviteur.



L'islamophobie, en tant qu'idéologie dominante, crée une représentation inversée de la réalité sociale. Par un mécanisme de projection inversée, elle impute à la cible de ses attaques, aux musulmans, un état d'arriération mentale qui est celui de la psychologie raciste. Les classes dominantes en France sont islamophobes par nécessité sociale, ce racisme constituant en quelque sorte un ethos de classe. L'exploitation forcenée des semi-prolétaires immigrés a besoin d'une justification idéologique, en l'occurrence le racisme anti-musulman. Mais cette islamophobie est assumée et constitue une ressource politique pour assoir une domination qui en tant que telle serait fragile. En même temps, elle s’avère être un puissant moyen d’éloigner les soutiens possibles à la cause palestinienne en France. C‘est pourquoi les agents actifs de l’islamophobie sont aussi souvent de fervents partisans d’Israël. La question sociale et la cause palestinienne sont donc consubstantiellement liées. La classe politique ne s’y est pas trompée en élevant le sionisme au rang d’idéologie officielle de l’Etat Français. En ce qui concerne les dominés, le niveau d’implication dans le soutien à la cause palestinienne constituera sans doute le révélateur de l’autonomie de leur mouvement et de leur maturation politique.


Comité Action Palestine

dimanche 18 octobre 2009

La Palestine n'est pas à vendre!



Le Samedi 17 Octobre 2009 à 15h

Place Bellecour – Lyon 2è

Encore meurtri par les conséquences désastreuses du blocus égypto-israélien et de l'agression israélienne de janvier, le peuple palestinien est une nouvelle fois trahi!

En effet, la délégation Abbas aux Nations unies à Genève vient de renoncer à une résolution demandant au Conseil des droits de l'Homme de transmettre le rapport du juge Richard Goldstone sur les crimes de guerre à Gaza au Conseil de sécurité de l'ONU pour obtenir des sanctions. Depuis le 22 janvier, date à laquelle a été déposée la plainte à la Cour Pénale internationale par Résistance Palestine et 500 ONG qui ont donné mandat à l'avocat lyonnais, l'Autorité Palestinienne n'a jamais fait la preuve de sa volonté de faire traduire les criminels de guerre israéliens devant la justice. Pire, elle n'a cessé de bâtir des obstacles qui ralentissent la procédure.

Abbas et sa clique de corrompus et d'incompétents n'ont pas levé le petit doigt alors que chaque jour des habitants de Jérusalem sont chassés de leurs maisons. De même alors que les forces d'occupation menacent la mosquée Al Aqsa, Abbas refuse d'intervenir et même d'organiser une réunion d'urgence sur la question.

Abbas et ses amis ont décidé de vendre la Palestine pour des dollars et des strapontins aux côtés de leurs protecteurs américano-sionistes. Les Palestiniens méritent mieux que ses dirigeants actuels et nous nous joignons aux voix de nombres d'entre eux qui demandent la dissolution de l'Autorité Palestinienne. Comme l'a écrit très justement un journaliste palestinien : « La trahison du peuple palestinien par l'AP au sujet du rapport Goldstone, ainsi que la poursuite de sa «coordination de sécurité» avec Israël pour réprimer la résistance et l'activité politique en Cisjordanie, doivent nous faire comprendre sans l'ombre d'un doute qu'il s'agit d'un bras actif de l'occupation israélienne, agissant de manière tangible et de plus en plus contre le peuple palestinien et sa juste cause. »

Répondez à l’appel du samedi 17 octobre 2009 Place Bellecour à 15h pour dénoncer :
- le blocus israélo-égyptien contre Gaza
- la politique de collaboration de l'Autorité Palestinienne
- les attaques contre la mosquée Al Aqsa
Demandons à ce que justice soit rendue pour les 1500 victimes de Gaza.
Appel lancé par Résistance Palestine Contact: RP 06.31.83.51.02
http://www.resistancepalestine.fr/ contact@resistancepalestine.fr

dimanche 4 octobre 2009

Michèle Sibony et Michel Warschawski réagissent aux propos d’Une autre voix juive pour la paix, qui, selon eux, associent dangereusement antisionisme et antisémitisme.

La tribune d’Une autre voix juive (UAVJ) parue dans le n° 1070 de Politis (« Que faire après Gaza ? ») appelle quelques remarques. Évacuant en préliminaire l’attaque israélienne sur Gaza et ses conséquences sur la population, UAVJ s’intéresse immédiatement à son propos majeur : « certains cercles pro-palestiniens » qui remettraient en cause les négociations israélo-palestiniennes. Et, pire, voudraient abandonner la « perspective deux peuples deux États ».


Près de vingt ans de négociations… comme s’il n’était pas légitime de s’interroger sur le sens de ces négociations et leur résultat : démantèlement de l’intégrité territoriale de la Cisjordanie, séparation de celle-ci et de la bande de Gaza, colonisation massive, mur de séparation, annexion de Jérusalem-Est, siège de Gaza, puis bombardements, invasion et crimes de guerre, peut-être même crimes contre l’humanité, dit le rapport Goldstone. Tout cela ne s’est-il pas passé à l’ombre de négociations tronquées où les droits des Palestiniens n’ont pas été pris en compte mais progressivement réduits, et où les faits du terrain imposés par Israël ont été progressivement entérinés par la communauté internationale ? Et comment ne pas s’interroger sur la perspective de deux États, alors que la carte qu’Israël dessine sous nos yeux depuis dix ans, sans que personne ne tente sérieusement de l’arrêter, est celle d’un grand État juif de la mer au Jourdain avec quelques enclaves palestiniennes isolées, destinées à lui servir de bassin de main-d’œuvre sans droits ? Mais ce n’est visiblement pas ce qui préoccupe UAVJ, dont le problème majeur transpire à chaque ligne : protéger inconditionnellement la légitimité d’Israël, menacée par des groupes palestiniens extrémistes et certains courants ambigus dans le mouvement de solidarité. L’existence d’une Palestine indépendante aux côtés d’un État israélien n’a de sens pour UAVJ que parce qu’elle garantirait la pérennité d’un État israélien, en tant qu’État (démographiquement) juif. Il faut pour cela interdire l’antisionisme, qui permettrait de remettre en question la nature actuelle d’Israël. Et l’antisionisme est renvoyé aux antisémites qui l’utilisent,« ce qui suffit à le disqualifier ».

Ce discours-là ressemble à s’y méprendre à celui de certains « penseurs » français du choc des civilisations. Mais UAVJ va plus loin et n’hésite pas à lier les mouvements antisémites qui pourraient s’emparer du boycott avec les populations musulmanes : « Une telle orientation [celle d’un boycott universitaire culturel et sportif] serait un grave danger pour les forces progressistes françaises et israéliennes qu’elle isolerait. Elle pourrait aisément être endossée par des mouvements antisémites, et ainsi contribuerait à creuser, en France, le fossé entre les populations de culture juive et de culture musulmane. » Insupportable raccourci qui disqualifie pour le coup la suite de la tribune présentant le travail d’UAVJ. L’action politique des mouvements anticolonialistes en Israël et d’organisations juives progressistes en Europe, comme l’UJFP en France, où nous avons, dans nos pays respectifs, fait le choix de militer, est en effet l’inverse de celui-là, et répond à une double démarche : d’une part, défaire les liens insupportables qui devraient nous rendre a priori solidaires de notre « communauté », de ses porte-parole et d’un discours politique dont l’alpha et l’omega sont le soutien inconditionnel à Israël et la défense de son impunité ; d’autre part, développer des liens de solidarité et un combat commun avec tous ceux qui luttent contre le colonialisme et le racisme, et pour l’application du droit. Un tel combat ne peut, évidemment, être conduit sous le drapeau du sionisme. En Israël comme en France, nous combattons le discours de propagande (du Crif en particulier) qui identifie sionisme et judaïsme, et son corollaire infâme qui lie antisionisme et antisémitisme. Lien qui emprisonne les Juifs dans un soutien inconditionnel à Israël et qui interdit toute critique d’Israël comme antisémite, en désignant de plus les nouveaux antisémitismes : « les populations de culture musulmane ».


À propos des citations de cette tribune, la première (« le temps de la négociation est dépassé ») n’est attribuée à personne, ce qui laisse évidemment l’imaginaire travailler en paix. La citation de Stop the Wall, dont la source est, involontairement, nous en sommes convaincus, tronquée, est tirée du « Rapport de synthèse de la 1re conférence palestinienne pour le Boycott d’Israël (BDS), 22 novembre 2007, Al-Bireh, Ramallah, sur le site d’ISM, rapport d’atelier n° 3 pour la campagne mondiale : stratégie et message ». Celle-ci remet effectivement en cause la légitimité d’Israël en tant qu’État colonial et d’apartheid. Petite différence, qu’élude peu élégamment UAVJ, parce qu’elle fait le parallèle avec l’Afrique du Sud : c’est en tant que régime d’apartheid que la légitimité de cet État était remise en question, et, une fois ce régime démantelé, l’Afrique du Sud a trouvé sa place dans la communauté des nations. Or, ce qu’il faudrait précisément pouvoir examiner après Gaza, sans avoir à être traité d’antisémite par UAVJ, c’est la nature sioniste de l’État d’Israël, ses institutions racistes, ses lois discriminatoires, en un mot ce qui en fait un État colonial et un régime d’apartheid. À l’inverse, ce qui n’est plus audible après Gaza, c’est un certain « sionisme de gauche » dont la préoccupation majeure demeure, même après le massacre, la préservation de l’État juif (et démocratique pour ses citoyens juifs) et non celle d’un État moderne et laïque pour tous ses citoyens. [1]


Michèle Sibony : Membre de l’Union juive française pour la paix (Paris).
Michel Warschawski : Membre du Centre d’information alternative (Jérusalem).
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------1] Texte d’UAVJ :
APRÈS GAZA : SUR UNE INITIATIVE « BOYCOTT DÉSINVESTISSEMENT SANCTIONS »


Neuf mois après la fin de l’attaque brutale sur Gaza et après l’élection en Israël d’un des gouvernements les plus à droite de l’histoire de ce pays, les perspectives d’une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens semblent plus éloignées que jamais. Du coup, dans certains cercles pro-palestiniens on entend s’exprimer les thèses selon lesquelles « le temps de la négociation (entre Israël et l’OLP) est passé » ou bien que la perspective « deux États pour deux peuples » devrait être abandonnée. L’idée d’une société fraternelle ou Juifs et Arabes jouiraient des mêmes droits est généreuse. Elle ne correspond pas, aujourd’hui, à une réalité politique. Chacun des deux peuples, israélien et palestinien, exprime très majoritairement une aspiration à avoir son État. L’État d’Israël existe ; la discussion sur ses origines a un sens mais ne saurait délégitimer ce qui résulte d’un choix très majoritaire des Nations Unies. La question est, conformément à toutes les résolutions de l’ONU, d’imposer la création d’un État palestinien viable, avec Jérusalem Est comme capitale, après évacuation des colonies de Cisjordanie, et solution négociée juste du problème des réfugiés. De même, déplacer le terrain de lutte pour une paix juste et durable sur celui de l’anti-sionisme serait une autre erreur. L’ambiguïté de cette terminologie, qui permet à des personnages médiatiques antisémites et négationnistes de s’en prévaloir en se déclarant pro-palestinien suffit à la disqualifier.


Alors, après Gaza, que faire ? Une proposition est de soutenir toutes les formes d’opposition non violente à l’occupation, comme, par exemple, les actions coordonnées menées à Bil’in contre le mur par des Palestiniens et des Israéliens. Une Autre Voix Juive soutient cette idée. Une autre proposition utile est de faire campagne pour des formes de sanctions qui seraient en vigueur tant qu’Israël ne s’engagerait pas concrètement dans la voie de la reconnaissance des droits nationaux palestiniens.


Ces actions sont de trois types : campagne pour la suspension des accords d’association UE/Israël ; campagne contre les investissements étrangers en Israël qui contribuent à la colonisation comme, par exemple, la construction ou l’exploitation du tramway reliant des colonies à Israël ; campagne contre la commercialisation en France de produits israéliens provenant des territoires occupés. La question de leur traçabilité est cruciale. L’Union européenne l’a exigée. Israël doit l’assurer. Cette campagne, dite de BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) pourrait avoir le soutien d’un grand nombre de démocrates en France. Mais pour cela, elle doit éviter les perversions de ses variantes au niveau international. Ainsi, un document émis par « Stop The Wall » qui coordonne la campagne BDS à l’échelle internationale énonce que « la campagne de BDS ne cible pas seulement l’économie israélienne, mais elle remet en cause la légitimité d’Israël, en tant qu’État colonial et d’apartheid, dans le cadre de la communauté internationale. Par conséquent, des efforts sont nécessaires non seulement pour promouvoir le boycott des consommateurs, mais aussi les boycotts dans les domaines universitaires, culturels et sportifs ».


Une telle orientation serait un grave danger pour les progressistes israéliens qu’elle isolerait. Elle pourrait aisément être endossée par des mouvements antisémites, et ainsi contribuerait à creuser, en France, le fossé entre populations de culture juive et de culture musulmane. Alimenter, l’idée d’une punition collective du peuple israélien, de surcroît trop souvent identifié à un hypothétique « peuple juif », aurait des résonances et des conséquences dont il est inutile de souligner la gravité. Une Autre Voix Juive, avec les 1100 signatures de son manifeste (voir http://uavj.free.fr ) réaffirmé obstinément depuis 2003, a fait la démonstration de l’existence en France, parmi les Français juifs, d’un fort courant qui dénie au CRIF et à Israël le droit de parler en leur nom, et qui proclame la légitimité des droits nationaux palestiniens, adossés aux résolutions de l’ONU.


Maintenir et renforcer ce courant parmi nos compatriotes juifs est un objectif dont l’importance, pour toutes sortes de raisons liées à l’histoire, dépasse largement la faiblesse numérique de la population concernée. UAVJ est prête à soutenir une campagne ciblée explicitement contre l’occupation et les colonies, et appuyant les efforts conjoints des forces de paix en Palestine et en Israël. Elle aura l’approbation de l’opinion publique. Dans la lutte difficile, que mènent les forces démocratiques pour aboutir à une paix juste et durable au Proche Orient, il faut savoir maintenir le cap, quelles que soient les embûches, et déjouer les provocations, d’où qu’elles viennent.


Une Autre Voix Juive, octobre 2009

Brise le blocus