lundi 30 novembre 2009

Prisonnières palestiniennes : 33 combattantes de la liberté

Il semble difficile de déterminer, au jour le jour, le nombre des prisonniers palestiniens dans les geôles de l’occupation, mais aussi le nombre des prisonnières à cause des enlèvements quotidiens opérés par les forces de l’occupation, en Cisjordanie surtout.

Mais selon le ministère des affaires des prisonniers, il semble qu’il reste encore 33 prisonnières palestiniennes, celles qui n’ont pu être libérées suite à l’envoi par la résistance palestinienne de la vidéo de quelques minutes sur le soldat franco-israélien Shalit, fait prisonnier par la résistance depuis juin 2006, alors qu’il participait à la guerre contre la bande de Gaza.

La libération d’une vingtaine de prisonnières contre l’envoi de la vidéo a été un succès remarquable pour la résistance, mais les sionistes n’ont libéré, à ce moment, que les femmes non condamnées à de lourdes peines. C’est pourquoi les femmes toujours détenues sont celles qui sont condamnées par les tribunaux militaires sionistes à des peines allant jusqu’à plusieurs perpétuités.

Trente-trois prisonnières sont toujours détenues. Elles seront libérées si l’échange entre le soldat israélien et les 1000 prisonniers palestiniens et arabes se fait, par le biais du négociateur allemand et l’aide du gouvernement égyptien.

Selon les informations envoyées par le ministère palestinien, 11 prisonnières sont détenues dans la prison de Damoun et 21 dans la prison d’Hasharon, et une prisonnière en isolement à Neve Tirtza, à la prison de Ramleh pour femmes, qui est Wafa’ al-Biss, de la bande de Gaza.

La répartition géographique des prisonnières indique que 25 sont originaires de la Cisjordanie, 4 de la ville d’al-Quds, 3 des territoires palestiniens occupés en 48 et une de Gaza.

20 prisonnières sont condamnées, cinq d’entre elles ont été condamnées à perpértuité, entre une et plusieurs, la peine la plus lourde étant celle de Ahlam Tamimi, de Ramallah, qui est condamnée à 16 perpétuité. 10 prisonnières sont arrêtées, sans être passées (encore) par un tribunal militaire pour se faire condamner, selon le rite sioniste établi. Trois prisonnières sont des détenues administratives, dont la prisonnière membre de la municipalité de Nablus, Majida Akram Fudda, arrêtée depuis août 2008, et dont la détention a été renouvelée pour la troisième fois. Il ya également Raja’ Qâsim al-Ghoul, de Jénine, arrêtée depuis le 31 mars 2009, qui est malade du cœur, dont la détention a été renouvelée pour la deuxième fois, et la prisonnière administrative Hana’ Yahya Shalabi, de Jénine également, arrêtée depuis le 14 septembre 2009.

Trois femmes sont prisonnières avec leurs maris. Il s’agit de Ahlam Tamimi, dont le mari est condamné à perpétuité également, Irina Sarahne, dont le mari est condamné à six perpétuités, et Iman Ghazawi, dont le mari est condamné à 20 ans de prison. Deux prisonnières ont des frères en prison, Fatin Saadi, et Abir Awda, prisonnière libérée mais kidnappée à nouveau par l’occupant. Six femmes prisonnières sont mères de famille, dont Latifa Abu Draa, de Nablus, dont les huit enfants attendent impatiemment la libération et Qahira Saadi, mère de trois enfants.

12 prisonnières sont gravement malades, parmi elles : Amal Fayez Jumaa, qui souffre d’un cancer, Wafa’ al-Biss qui souffre de graves brûlures qui n’ont pas été soignées, après son enlèvement.

Ci-dessous la liste des prisonnières palestiniennes condamnées encore détenues dans les geôles sionistes

Nom Lieu d’habitation condamnation Date d’enlèvement

Ahlam Tamimi Ramallah 16 perpétuités 14 /9/ 2001
Amina Muna Quds Perpétuité 20/1/2001
Qahira Saadi Jénine 3 perpétuités + 30 ans 8/5/2002
Sana’ Shihade Quds Perpétuité 24/5/2002
Du’a Jayusi Tulkarm 3 perpétuités 6/7/2002
Irina Sarahne Bethlehem 20 ans 23/5/2002
Iman Ghazawi Tulkarm 13 ans 8/3/2001
Nada Dirbas Quds 6 ans 8/5/2007
Wardé Bakrawi Galilée 48 8 ans 16/10/2003
Mariam Tarabin Jericho (Ariha) 8 ans 13/3/2005
Abir ‘ Amru Khalil 16 ans 20/2/2001
Lina Jarbuni Jénine 17 ans 17/4/2002
Fatna Abul Aysh Nablus 15 ans 21/7/2006
Wafa’ al-Biss Gaza 12 ans 20/5/2005
Ibtisam Issawi Quds 14 ans 14/11/2001
Wurud Qâsim Tirah 48 6 ans 10/4/2006
Latifa Abu Draa Nablus 25 ans 10/12/2003
Amal Jumaa Nablus 12 ans 10/5/2004
Fatin Saadi Jénine 2 ans 28/5/2008
De plus, les militaires sionistes tiennent encore les corps de plusieurs martyres palestiniennes, depuis Dalal al-Moghrabi, combattante tombée martyre en 1978 et qu’Israël refuse de rendre le corps à la famille, jusqu’aux martyres de l’Intifada al-Aqsa, Ayat al-Akhras, Darine Abu Ayshe, Wafa’ Idriss, Hanadi Jaradat et Hiba Daraghmeh. Les corps de toutes ces martyres n’ont pas encore été rendus à leurs familles.

Des voix palestiniennes s’élèvent de plus en plus forts, depuis l’échange de 2008 entre le Hizbollah et Israël, par le biais des instances internationales, réclamant le retour des corps des martyrs palestiniens, considérés enlevés par les sionistes. Il faut ajouter que ce dossier, qui prend de plus en plus d’ampleur, deviendra prioritaire, notamment depuis qu’un journaliste suédois a accusé les autorités sionistes de trafic d’organes. Malgré les dénégations sionistes, que personne ne croit d’ailleurs, il semble que le refus sioniste de rendre les corps des martyrs est dû aux mutilations que les sionistes ont opéré sur les corps.

LIBERATION IMMEDIATE ET INCONDITIONNELLE
DE TOUS LES PRISONNIERS PALESTINIENS ET ARABES
DES GEOLES SIONISTES

dimanche 22 novembre 2009

Le doyen des prisonniers politiques dans le Monde

Pour une proclamation unilatérale d’indépendance de la Palestine et son inscription au patrimoine de l’humanité.
René Naba | 21/11/2009 | Paris
Paris, 21 Novembre 2009. Mois chargé de dates symboliques lourdes de décisions douloureuses aux conséquences dramatiques pour le peuple palestinien, Novembre commémore tout à la fois la Promesse Balfour, le 2 novembre 1917, engageant la Grande Bretagne à aménager sur le territoire d’autrui un «Foyer national juif» en Palestine (1), la Résolution N°181 de l’Assemblée générale des Nations unies du 29 novembre 1947 portant plan de partage de la Palestine en deux états, l’un juif, l’autre arabe, et la résolution 242 du Conseil de sécurité du 22 novembre 1967 posant les bases du règlement du conflit israélo-arabe.
92 ans après la promesse Balfour, 62 ans après le plan de partage, 42 ans après la résolution internationale, la Palestine, berceau des trois grandes religions monothéistes Islam, Christianisme et Judaïsme, haut lieu de la coexistence entre Orient et Occident, est devenue le plus grand camp de concentration à ciel ouvert de l’époque contemporaine avec ses dix mille prisonniers politiques palestiniens, une population en agonie sous le poids de ses 750 barrages militaires, un mur discriminatoire de séparation, trois fois plus long que le Mur de Berlin, alors que, parallèlement, 80 pour cent du territoire palestinien a été spolié et gangrené par des colonies israéliennes de peuplement, 80% des ressources aquifères de Cisjordanie ponctionnée au profit des Israéliens, de même que les ressources gazières au large de Gaza, qui font l’objet d’un véritable rapt (2).
Le renonciation de Mahmoud Abbas à une nouvelle mandature présidentielle, carbonisé par ses atermoiements dans l’affaire du rapport Goldstone sur Gaza et par la rebuffade américaine à propos des colonies de peuplement israélien a retenti, le 5 novembre 2009, à six jours de la commémoration décès de Yasser Arafat, comme un défi à la légalité internationale, une insulte à L’Organisation des Nations unies, dans son incapacité à régler la question palestinienne.
Dans cette perspective, une proclamation unilatérale d’indépendance de l’Etat palestinien et l’inscription de la Palestine au patrimoine de l’humanité rendraient à l’organisation internationale un peu d’humanité, à défaut de crédibilité, en même temps qu’elles abrogeraient la souffrance du peuple palestinien innocent en sanctionnant les procédés dilatoires israéliens.
I. Un palestinien, Saïd Wajih Al-Ataba (3), doyen des prisonniers politiques dans le Monde.
Même sur le plan carcéral, la palme revient également à la Palestine. Un palestinien, Saïd Wajih Al-Ataba, revendique, en effet, le triste honneur d’être le doyen des prisonniers politiques dans le monde, avec à son actif 32 ans de détention, battant de près de cinq ans le record de Nelson Mandela, le chef du mouvement indépendantiste sud africain ANC (African National Congress) et futur président de l’Afrique du sud post apartheid.
Depuis la 3me guerre israélo-arabe de juin 1967 et l’occupation des territoires arabes qui s’en est ensuivie, 42% des hommes palestiniens ont été au moins une fois interpellés. Dix mille y croupissent dans les geôles israéliennes pour des peines de longue durée.
Le record de Nelson Mandela – détenu, lui, pendant 27 ans et 190 jours à la prison de Robben Island -est largement battu non seulement par Saïd Al-Ataba mais également par quatre autres militants palestiniens. Au total, quatorze palestiniens sont détenus depuis un quart de siècle par Israël, dont douze ont même dépassé ce cap, et deux seulement sont détenus depuis 25 ans, selon le décompte établi en 2009 sur la base du relevé de la date de leur incarcération.
A la fin de l’année 2007, le nombre de Palestiniens qui avaient passé plus de quinze ans dans les prisons israéliennes avait atteint 232 personnes, et ceux qui y avaient passé plus de vingt ans étaient au nombre de 73 captifs.
Parmi les détenus longue durée, trois militants palestiniens sont originaires de Wadi Ara, tous trois membres de la famille Younes (Sami Khaled Salameh Younes, Karim Youssef Younes, Maher Abdel-Latif Younes). Wadi Ara ou Nahal Iron (en arabe: وادي عارة) fait référence à une zone à l’intérieur d’Israël, principalement peuplée par des Arabes. Elle est située au nord-ouest de la ligne verte, principalement au sein du district de Haïfa. Trois autres militants palestiniens sont originaires de Ramallah, siège de l’autorité palestinienne et du mausolée de Yasser Arafat, chef historique du mouvement national palestinien, à 15 km au Nord de Jérusalem, dans la zone des collines du centre de la Palestine. Deux sont de la famille Barghouti (Na’êl Abdallah Al Barghouti et Fakhri Al Barghouti), le troisième est Hassan Ali Nimr Salamah. Marwane Al Barghouti, le charismatique dirigeant de la relève palestinienne, condamné en 2004, ne compte pas suffisamment d’ancienneté carcérale pour figurer dans ce palmarès.
Saïd Wajih Al-Ataba, Marwane Al Barghouti (Fatah) et Ahmad Saadate (FPLP) figurent en tête de liste des prisonniers dont le Hamas réclament la libération en échange de celle de Gilad Shalit, le soldat franco-israélien capturé par un commando palestinien à la lisière de la bande de Gaza, en 2006.
Afin que leur combat ne soit pas vain et que leur longue détention ne les plonge pas dans l’oubli de la mémoire des hommes, voici la liste de ses résistants:
1- Saïd Wajih Al-Ataba, doyen des prisonniers palestiniens depuis la libération du libanais Samir Kintar, en 2008, à la faveur d’un échange de prisonniers avec le Hezbollah. Neveu du chef de la section locale pour le secteur de Naplouse du Parti communiste palestinien, Saïd al Ataba est détenu depuis 32 ans. Il a davantage passé du temps en prison que dans la vie active.
Né en 1951 à Naplouse, Saïd Wajih Al-Ataba s’est distingué à 15 ans en manifestant contre les troupes jordaniennes qui contrôlaient à l’époque la Cisjordanie, puis ultérieurement contre les forces d’occupation israéliennes. Il est l’un des organisateurs de la manifestation de protestation anti-israélienne qui a suivi La mort d’une militante palestinienne connue, Lina Naboulsi, en 1975.
Il a été arrêté le 29 juillet 1977, à l’âge de 26 ans, à Naplouse (Cisjordanie) pour son appartenance à un commando du Front Démocratique de libération de la Palestine (FDLP, organisation marxisante dirigée par Nayef Hawatmeh). Il a été condamné à trois peines de prison à vie et purge sa peine à la prison d’Ashkelon, la ville portuaire méditerranéenne désignée en arabe par Askalane.
Un membre de son réseau, auteur d’un attentat à la bombe en Israël, faisant un mort et 33 blessés, a été tout comme Saïd Al-Ataba condamné à perpétuité. Il a été libéré en 1985 dans le cadre d’un échange de prisonniers, alors que Saïd Wajih Al-Ataba, paradoxalement, est resté en prison, Israël ayant refusé au dernier moment de le libérer au prétexte qu’il avait été «condamné à perpétuité». Son chef politique, Yasser Abed Rabbo, rentré dans les Territoires palestiniens après la signature des accords d’Oslo en 1993, est le coauteur du plan de paix de Genève avec son ami israélien, l’ancien ministre travailliste israélien Yossi Beilin. Saïd Al-Ataba s’est lui aussi prononcé en faveur de ce plan de paix.
Voici la répartition des prisonniers selon leur ancienneté et leur provenance géographique:
2• Na’êl Abdallah Al-Barghouti, originaire de la Région de Ramallah. Date d’incarcération le 4 avril 1978, célibataire, né en 1957. (31 ans de détention)
3• Fakhri Al-Barghouti, originaire de la Région de Ramallah. Date d’incarcération le 23 juin 1978, marié, né en 1954. (31 ans de détention)
4• Akram Abdel Aziz Mansour, originaire de Qalqyliah, au nord ouest de la Cisjordanie. Date d’incarcération le 2 août 1979, célibataire, né en 1962. (30 ans de détention)
5• Fouad Kassem Al-Razim, originaire de Jérusalem «al-Quds». Date d’incarcération le 30 janvier 1981, célibataire, né en 1958. (28 ans de détention)
6• Ibrahim Fadl Nimr Jaber, originaire d’Hébron -Al-Khalil (Cisjordanie). Date d’incarcération le 8 janvier 1982, marié, né en 1954. (27 ans de détention)
7• Hassan Ali Nimr Salamah, originaire de Ramallah. Date d’incarcération le 8 août 1982, marié, né en 1958. (27 ans de détention)
8• Ousmane Ali Hamdan Mouslih, originaire de Naplouse-Nablus (Cisjordanie). Date d’incarcération le 15 octobre 1982, marié, né en 1952. (27 ans de détention).
9• Sami Khaled Salamah Younes, originaire de Wadi Ara (Palestine 1948), date d’incarcération le 5 janvier 1983, marié, né en 1932. 26 ans de détention.
10• Karim Youssef Younes, de Wadi Ara (Palestine 1948). Date d’incarcération le 6 janvier 1983, célibataire, né en 1958. 26 ans de détention
11• Maher Abdel-Latif Younes, de Wadi Ara (Palestine 1948). Date d’incarcération le 20 janvier 1983, célibataire, né en 1957. 26 ans de détention
12• Salim Ali al-Kayyal, originaire de Gaza, date d’incarcération le 30 mai 1983, marié, né en 1952. 26 ans de détention.
13• Hafiz Nimr Qinds, de Jaffa-Yafa (Palestine 1948). Date d’incarcération le 15 mai 1984, célibataire, né en 1958. 25 ans de détention
14• Issa Nimr Abd Rabbo, Deheishe, Bethlehem. Date d’incarcération le 21 octobre 1984, célibataire, 46 ans. 25 ans de détention.
Le camp de réfugiés de Deheishe a été construit en 1949 sur un territoire d’une dimension d’environ 430 dounoums (soit environ 1 km carré) à l’intérieur des frontières de la ville de Bethléem sur la rive occidentale du jourdain. Les Palestiniens qui se retrouvèrent à Deheishe venaient de plus de 45 villages situés à l’ouest de Jérusalem et d’Hébron.
C’est l’un des soixante et un camps aménagés par l’UNRWA (United Nations Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East – Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient) pour reloger les 750.000 Palestiniens des régions côtières et des plaines de Palestine, expulsés de leur maison par les israéliens au moment de la fondation d’Israël, en 1948.
II. La Palestine, le plus grand camp de concentration à ciel ouvert de l’époque contemporaine.
Pour mémoire ; Nelson Mandela, le Chef du mouvement indépendantiste sud africain ANC (African National Congres) et futur président de l’Afrique du sud post apartheid, a été détenu pendant 27 ans et 190 jours à la prison de Robben Island.
Robben Island (en anglais) ou Robbeneiland (en afrikaans) est une île d’Afrique du Sud, au large du Cap, qui a servi au XXe siècle de prison politique pour les opposants noirs au régime d’Apartheid. Elle a été inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO en 1999.
Depuis la 3me guerre israélo-arabe de juin 1967 et l’occupation des territoires arabes qui s’en est ensuivie, 80 pour cent du territoire palestinien a été spolié et gangrené par des colonies israéliennes de peuplement, 80% des ressources aquifères de Cisjordanie ponctionnée au profit des Israéliens, de même que les ressources gazières au large de Gaza, qui font l’objet d’un véritable rapt (3), alors que parallèlement 42% des hommes palestiniens ont été au moins une fois interpellés, soit près de la moitie de la population.
Au moment où l’Assemblée générale des Nations unies s’apprête à célébrer, ce 29 novembre, le 62 me anniversaire du plan de partage de la Palestine (résolution 181), un an après la conférence de relance américaine d’Annapolis, l’organisation internationale serait avisée de songer à inscrire au patrimoine de l’humanité, la Palestine, le plus grand camp de concentration à ciel ouvert de l’époque contemporaine avec ses dix mille prisonniers politiques palestiniens, ses 750 barrages militaires, un mur discriminatoire de séparation, alors que, parallèlement, 80 pour cent du territoire palestinien a été spolié et gangrené par alors que, parallèlement, 80 pour cent du territoire palestinien a été spolié et gangrené par des colonies israéliennes de peuplement, 80% des ressources aquifères de Cisjordanie ponctionnée au profit des Israéliens, de même que les ressources gazières au large de Gaza, qui font l’objet d’un véritable rapt.
III. Le Mur d’Apartheid un «Mur de Jéricho moderne»
La chute du Mur de Berlin célébrée avec faste le 9 novembre dernier par les chancelleries occidentales ne saurait occulter la nouvelle réalité issue de la mondialisation des flux. Aux murs anciens séquelles de la guerre froide (Corée, Chypre, Sahara occidental, Ceuta et Melilla, le filtre à l’immigration vers la riche Europe) se sont greffés de nouveaux murs notamment entre les Etats-Unis et le Mexique, le long du Rio Grande, pour protéger l’Amérique de l’invasion latino américaine, en Arabie saoudite, pour protéger la pétromonarchie tant de l’Irak que du Yémen que le Royaume a cherché à déstabiliser depuis un demi siècle, voire en Irak même, dans la zone verte de Bagdad, le périmètre aménagé dans l’ancien palais présidentiel irakien pour protéger les envahisseurs américains des coups de butoir de la guérilla irakienne.
En Europe, sous l’impulsion du «pacte pour l’immigration» proposé par la France à ses partenaires européens, la Commission européenne a identifié, de son côté, en mai 2009, une liste de 45 projets de recherche public – privé, intitulé «Vers une société plus sûre et une meilleure compétitivité industrielle», dont huit sont clairement dédiés à la protection des frontières (4).
Mais de tous ces murs, seul le mur d’apartheid israélien a été édifié sur le territoire d’autrui. Un véritable «Mur de Jéricho moderne», qu’il importera d’abattre, dont la Cour internationale de Justice de La Haye a invité à son démantèlement partiel lorsqu’il rogne sur les territoires palestiniens occupés, estimant «illégal» cet édifice et «non conforme à plusieurs obligations légales internationales incombant à Israël» (5). En ciment armé d’une hauteur de huit mètres, d’une longueur de 750 kilomètres, trois fois plus long que le Mur de Berlin et deux fois plus haut, ce «Mur d’Apartheid» enferme plus de trois millions de personnes dans des dizaines de villes et villages de Cisjordanie et de la région de Jérusalem.
L’implosion politique de Mahmoud Abbas, le 5 novembre 2009, à six jours de la commémoration décès de Yasser Arafat a justifié a posteriori le scepticisme du chef historique des Palestiniens à l’égard des pays occidentaux
et porte condamnation de la complaisance de son successeur à l’égard de leur duplicité. Elle signe l’arrêt de mort du processus d’Oslo amorcé en 1993 visant à la proclamation d’un état palestinien indépendant comme terme ultime du règlement pacifique du conflit israélo-palestinien, en même temps qu’elle révèle la servilité du chef de la diplomatie américaine, Hillary Clinton, secrétaire d’état, à l’égard d’Israël, et celle de l’Egypte tant à l’égard d’Israël que des Etats-Unis.
«L’adieu aux armes» aura été fatal à Mahmoud Abbas. Carbonisé par ses atermoiements dans l’affaire du rapport Goldstone sur Gaza et par la rebuffade américaine à propos des colonies de peuplement, sa renonciation à une nouvelle mandature présidentielle apparaît d’autant plus cruellement pathétique qu’elle a coïncidé avec une cinglante leçon de courage que lui ont assénée de jeunes palestiniens et de pacifistes israéliens avec leur percée opérée dans le mur d’apartheid israélien à l’occasion de la commémoration du vingtième anniversaire du chute du mur de Berlin. Une action qui a retenti comme un camouflet à Mahmoud Abbas et à Israël, un défi à la léthargie des instances internationales, un cadeau posthume à Yasser Arafat, initiateur de la lutte armée palestinienne, une insulte à l’Egypte pour son suivisme proaméricain et à L’Organisation des Nations unies dans son impuissance à régler la question palestinienne.
Une proclamation unilatérale d’indépendance de l’Etat palestinien constituerait un véritable électrochoc à l’effet de déterminer la marge d’autonomie du président Barack Obama à l’égard du lobby pro israélien dans la détermination de la politique américaine au Moyen orient et la validité de son discours fondateur du Caire (5 juin 2009).
Le plan de partage de la Palestine, en 1947, avait légalisé un projet qui constituait à l’origine un «fait colonial». L’inscription de la Palestine au patrimoine de l’humanité rendrait à l’organisation internationale un peu d’humanité, à défaut de crédibilité, en restaurant les Palestiniens dans leurs Droits légitimes, abrégeant leurs souffrances en leur concédant une maigre compensation à la trop grande injustice dont ils ont pâti du fait des turpitudes occidentales. Elle redorerait en prime le blason du pouvoir palestinien gravement discrédité par sa trop grande complaisance à l’égard de la duplicité occidentale.
Les menaces de rétorsion israéliennes paraissent dans ce contexte pathétiquement dérisoires au regard des enjeux du fait que les accords israélo-palestiniens d’Oslo de 1993 ont déjà été vidés de leur substance dès 1995 par Benyamin Netanyahu en personne sans susciter la moindre réaction internationale, du fait aussi que les Palestiniens, par anticipation, ont, de tout temps, été, en tout état de cause, la cible de représailles permanentes et continuelles de la part des Israéliens, du fait enfin que de telles menaces enfin ne sauraient dissuader les Palestiniens de mettre en œuvre la satisfaction de leur objectif suprême, la justification de tous leurs sacrifices, la réalisation de leur destin national.
Une telle démarche ne constituerait d’ailleurs pas une nouveauté en droit international. Elle serait en tout point similaire à celle empruntée par Israël avec sa déclaration unilatérale d’indépendance du 14 Mai 1948. Elle provoquerait un bouleversement psychologique à l’effet de placer les Israéliens sur la défensive, une décision qui aurait le mérite de crever l’abcès au risque de déboucher sur un conflit territorial à l’effet de lever l’ambiguïté sur les intentions des alliés d’Israël, les Etats-Unis et l’Union Européenne.
Terme ultime d’un combat inégal de soixante ans, la proclamation unilatérale de l’indépendance de la Palestine fera date dans l’histoire en ce qu’elle résonnera dans la conscience universelle comme la sanction des procédés dilatoires d’Israël et son mépris de la légalité internationale. A n’en pas douter, elle sera perçue par l’opinion internationale comme la fin de l’exception israélienne et la mise en conformité aux normes internationales de l’Etat d’Israël, seul état au monde crée par une décision de l’ONU avec le Kosovo.
Références
1. La promesse Balfour: le 2 novembre 1917, en pleine guerre mondiale, le ministre britannique des Affaires étrangères, Lord Arthur James Balfour publie une lettre où il indique que son gouvernement est disposé à créer en Palestine un «foyer national juif». Cette lettre ouverte n’a pour les Anglais d’autre intérêt que de rassurer les juifs américains, plus portés à soutenir les Puissances centrales qu’une alliance où figure la Russie au passé lourdement antisémite. Mais elle va légitimer trente ans plus tard la création de l’État d’Israël. Adressée au baron de Rothschild, la lettre a été en fait rédigée en étroite concertation avec ce dernier, qui préside l’antenne anglaise du mouvement sioniste, promoteur de l’installation des juifs en Palestine.
2. Le rapt des réserves naturelles de Gaza par Israël (deuxième partie)
L’objet véritable du conflit par Peter Eyre Mondialisation.ca, Le 3 novembre 2009 The Palestine Telegraph.
Le champ Mari B d’Israël entre en fait dans les eaux de Gaza et pourrait être classifié comme propriété conjointe. Israël reçoit du gaz naturel de ce champ depuis 2003 sans susciter la moindre condamnation internationale.
Noble Energy a découvert le champ gazier Mari B en mars 2000 et a entamé la première production israélienne en offshore le 24 décembre 2003. Le site de production est destiné à produire jusqu’à 600 millions de mètres cube par jour. Noble Energy a estimé que le total des réserves récupérables dépassait le trillion de mètres cube. Noble Energy est l’opérateur du projet avec 47,059% de participation directe avec des partenaires israéliens Avner Oil Exploration Limited participation 23% Delek Drilling Limited participation 25,5% et Properties Ltd 4,441%. Les Accords d’Oslo en 1995 ont donné aux pêcheurs de Gaza une zone de 20 miles nautiques, une reconnaissance neutralisée par le gouvernement israélien. L’accord Bertini, en 2002, leur donnait une zone de 12 miles, réduite par la suite par l’armée israélienne à 6 miles nautiques en 2006. Cette zone elle-même est entrecoupée de zones tampons, la zone K, sur la frontière nord avec Israël avec 1,5 mile nautique de large et au sud, la zone M sur la frontière égyptienne avec 1 mile nautique de large. Entre les deux se situe la zone L, totalement contrôlée par la marine israélienne de manière très agressive.
3. La photo illustrant cet article a été tirée du site http://www.jerusalemites.org/Testimonies/36.htm
Site dédié aux témoignages des personnes originaires de Jérusalem «Al Makdissiounne»»
4. Le «Pacte pour l’immigration» proposé sous la présidence française de l’Union européenne (juin – décembre 2008) par M. Brice Hortefeux, alors Ministre de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire, se proposait au niveau européen un double objectif: Harmoniser, d’une part, les politiques européennes en matière de flux migratoire en fonction des capacités d’accueil de l’Europe sur le plan du marché du travail, du logement et des services sanitaires. Instaurer, d’autre part, au niveau communautaire, une harmonisation des politiques d’expulsion des migrants illégaux, du droit d’asile, et de la promotion de l’immigration professionnelle légale.
La Commission européenne a identifié, de son côté, en mai 2009, une liste de 45 projets de recherche public – privé, intitulé «Vers une société plus sûre et une meilleure compétitivité industrielle», dont huit sont clairement dédiés à la protection des frontières. Leurs acronymes révèlent leurs objectifs: EFFISEC (Efficient Integrated Security Checkpoints); AMASS (Autonomous Maritime Surveillance System); GLOBE (Global Border Environment); TALOS (Transportable Autonomous patrol for Land border Surveillance system); UNCOSS (Underwater Coastal Sea Surveyor); WIMA (Wide Maritime Area Airborne Surveillance; OPERAMAR (An Interoperable Approach to European Union Maritime Security Management); SECTRONIC (Security System for Maritime Infrastructure, Ports and Coastal Zones).
5. Dans un arrêt en date du 09/07/2004, la Cour a confirmé ce que redoutaient les autorités israéliennes, à savoir l’illégalité au regard du droit international de l’ouvrage qu’elles construisent en Cisjordanie au nom de la lutte anti-terroriste. Le texte indique ainsi que «la Cour a conclu que la construction du mur constituait une action non conforme à plusieurs obligations légales internationales incombant à Israël». Précisant que ces violations du droit, conséquences directes selon elle de l’édification de la «barrière de sécurité», la juridiction a notamment mentionné les entraves à la liberté de mouvement des Palestiniens, les entraves à leur droit au travail, à leur droit à la santé, à l’éducation, et à un «niveau de vie adéquat». Ces exigences sont consignées dans des conventions internationales auxquelles l’Etat hébreu a pourtant adhéré.
Source: www.renenaba.com

vendredi 13 novembre 2009

Le convoi d’aide européenne est arrivé à Gaza avec un mois de retard


Le convoi européen d’aide médicale “Miles of Smiles” est arrivé à Gaza dans la nuit de mercredi, après avoir passé 25 jours à attendre du côté égyptien. Hamdi Sha’th, chef du Comité contre le siège, a dit à Ma’an par téléphone que le convoi ne pourrait rester à Gaza que 48 heures et quitterait Gaza vendredi, après la prière de midi. La brièveté du séjour fait partie des conditions négociées par les officiers frontaliers égyptiens.

Les conditions initiales stipulaient une visite de 24 heures, mais les négociations avec les responsables du convoi ont permis d’allonger le séjour d’une journée supplémentaire.

jeudi 12 novembre 2009

Nitsirit Ilit, une colonie prétendument légale


Traduit par CIREPAL (Centre d’Information sur la Résistance en Palestine)

Ameer Makhoul, directeur général d’Ittijah et président de la commission des libertés (Palestine 48)
11 novembre 2009
Le 10 novembre 2009, Shimon Gafso, président de la municipalité de Nitsirit Ilit a annoncé son plan de re-judaïsation de la ville, suite à l’accroissement manifeste de la présence arabe (plus du quart de la population), au moment où les juifs, et notamment les jeunes, refusent de plus en plus d’y vivre.
Les axes de son plan se complètent, l’un garantit une immigration « qualitative » des juifs, et le second constitue un message clair aux Arabes de la ville, qui y ont immigré, individuellement, à la recherche d’une solution individuelle à la crise du logement ou du travail qu’ils rencontrent dans les villes arabes de la région. Il leur a proposé à rechercher « une autre maison », selon l’expression du site NRG (ou GRN).
L’exécution pratique du plan consiste à faire venir les colons de Gosh Qtayf, des anciennes colonies de Gaza, la construction du projet « Har Yona 3 », qui est une ville des religieux (Haridim) et la construction d’un centre spirituel juif régional, et faire venir des groupes appelés « les noyaux durs sionistes » qui sont des militaires religieux nationalistes, à partir des blocs de colonisation et des écoles religieuses militaires, qui ont assuré la formation des terroristes juifs...

lundi 9 novembre 2009

François Cluzet parle de Salah Hammouri



par akeshi

dimanche 8 novembre 2009

Israël en pleine déconfiture

8 novembre 2009 Rim al-Khatib

Au cours de cette semaine, l'Etat sioniste criminel a joué aux pirates en pleine Méditerranée : il capture un cargo chargé de marchandises venant d'Iran et destinées à la Syrie. Il lance une opération médiatique de grande envergure pour dénoncer ce qu'il prétend être "le trafic d'armes entre l'Iran et le Hezbollah". Dès son acte de piratage, d'ailleurs non dénoncé par le conseil de sécurité ni par les puissances occidentales en général, le Hezbollah et le régime syrien démentent : le Hezbollah dément que les marchandises lui sont destinées et le régime syrien annonce qu'il n'y a point d'armes, mais uniquement de la marchandise. Après son coup, Israël crie victoire: il vient de mettre la main sur des armes.... qu'il expose dans le port d'Ashdod. Mais surprise: les médias ne lui prêtent aucune attention ! Le coup est tellement gros que personne, même les amis de cet Etat illégal, ne suit l'affaire. En plein vote de l'ONU sur le rapport Goldstone, les médias internationaux l'ont bien compris: Israël voulait détourner l'attention de ce qui se passe à l'ONU pour se mettre en avant, se faire victime encore une fois. Mais il y a pire : les enquêtes de l'armée libanaise (le cargo libéré sans sa marchandise, mais avec tout son équipage, se trouve actuellement à Beirut) et des journalistes d'al-Manar ont montré que : - le cargo, même si à l'origine venait d'Iran, a fait un long parcours avant d'être attaqué par les pirates isaéliens: il s'était arrêté en Egypte, puis à Chypre, puis en Italie, avant de se diriger vers la Syrie. Est-il normal qu'il transporte des armes à destination de la résistance et passe par l'Egypte ou par un port européen ? Une fois encore, les services secrets israéliens, qui faisaient parler d'eux avec brio dans les années 60 et 70, ont montré leur échec.

Il y a un triple échec dans ce dernier acte de piratage israélien :  le premier échec est celui des services de renseignements qui ont raté les informations importantes sur ce cargo. Il y a l'échec de l'opération médiatique qui a suivi : les médias ont suivi la discussion sur le rapport Goldstone et ont délaissé l'affaire du cargo. Même les journaux américains, quand ils en ont parlé, ont à peine rapporté la nouvelle, sans la confirmer. Il y a l'échec politique : depuis plusieurs mois, Israël cherche à susciter la question des armes de la résistance, au Liban, pour empêcher la formation du gouvernement d'unité nationale. Que ce soit par le biais de l'ambassadrice américaine ou par celui de Ban Ki Mon, secrétaire général de l'ONU, L'Etat sioniste suscite affaire après affaire pour déstabiliser la situation libanaise. Mais lui et ses complices ont encore échoué, puisque le gouvernement libanais dirigé par Hariri sera bientôt annoncé, d'après les dernières nouvelles, avec deux ministres pour le Hezbollah et un communiqué ministériel qui ne remet pas en cause les armes de la résistance, au contraire. Le plus intéressant dans l'affaire, c'est la réponse de Michel Aoun, l'allié du Hezbollah à cette tentative de déstabiliser la situation interne : "Des armes pour le Hezbollah ? Et alors ? Il faut bien se défendre ! Est-ce que Israël a occupé la Palestine avec des bonbons ?"

Sommes-nous en train d'assister, finalement, à la lente mais sûre chute de cette colonie de peuplement ? Pour la troisième fois, Israël reconnaît son échec médiatique: lors de la guerre meurtrière contre le Liban en 2006, lors de la guerre génocidaire contre Gaza début 2009 et dans cette affaire... Malgré toutes les photos montrées sur le port d'Ashdod, photos d'armes désuètes pour la plupart (la résistance a heureusement des armes beaucoup plus modernes), seuls les médias israéliens ont été trompés, si l'on veut exclure leur collaboration à cette mise en scène. Sans crier victoire trop tôt, il est incontestable que l'Etat sioniste est en train de s'enliser dans sa propre boue.

samedi 7 novembre 2009

Yasser Arafat, Mister Palestine for ever

7 novembre 2009 par René Naba


René Naba | 07/11/2009 | Paris
Illustration: Avec le président palestinien Yasser Arafat au Sommet des non-alignés à Harare (Zimbabwe), juin 1988, à la suite du discours dans lequel le chef de l’Organisation de Libération de la Palestine souscrivait pour la première fois à la résolution 242 du Conseil de sécurité de l’ONU prescrivant un règlement d’ensemble du conflit israélo-palestinien.
Paris, 7 novembre 2009. Rien, absolument rien, ne sera épargné à celui que l’on a surnommé parfois, à juste titre, « le plus célèbre rescapé politique de l’époque contemporaine », et ce prix Nobel de la Paix, un des rares arabes à se voir attribuer un tel titre, boira la coupe jusqu’à la lie.
Le chef palestinien décédera pourtant le 11 novembre 2004, sans n’avoir cédé rien sur rien, sur aucun des droits fondamentaux de son peuple, pas plus sur le droit de disposer de Jérusalem comme capitale que sur le droit de retour de son peuple dans sa patrie d’origine. Sa stature sans commune mesure avec celle de son terne successeur, Mahmoud Abbas, un bureaucrate affairiste sans envergure et sans charisme, hante encore la conscience occidentale, cinq ans après sa mort.
L’implosion politique de Mahmoud Abbas, le 5 novembre 2009, à six jours de la commémoration décès de Yasser Arafat justifie a posteriori le scepticisme du chef historique des Palestiniens à l’égard des pays occidentaux et porte condamnation de la complaisance de son successeur à l’égard de la duplicité occidentale, en même temps qu’elle révèle la servilité de la diplomatie américaine et de son chef, Hillary Clinton, secrétaire d’état, à l’égard d’Israël.
Carbonisé par ses atermoiements dans l’affaire du rapport Goldstone sur Gaza et par la rebuffade américaine à propos des colonies de peuplement, la renonciation de Mahmoud Abbas à une nouvelle mandature présidentielle apparaît d’autant plus cruellement pathétique qu’elle s’est accompagnée d’une cinglante leçon de courage que lui ont asséné de jeunes palestiniens en opérant, non sans risque, une percée dans le mur d’apartheid à l’occasion de la commémoration du vingtième anniversaire de la chute du mur de Berlin, une action qui a retenti comme un camouflet à Mahmoud Abbas et à Israël, un défi à la léthargie des instances internationales, un cadeau posthume à Yasser Arafat, initiateur de la lutte armée palestinienne.
Retour sur une vie de combat à l’occasion de la commémoration du 5 ème anniversaire de la mort de Yasser Arafat à l’hôpital militaire de Clamart (région parisienne), l’homme sans lequel la Palestine aurait été rayée de la carte du monde.

I. Le keffieh palestinien, c’est lui.
Le keffieh palestinien, c’est lui. Son portrait en lunettes noires et Keffieh, en couverture du magazine «Time», dans la foulée du premier fait d’armes palestinien contre l’armée israélienne, lors de la légendaire bataille d’Al-Karameh, le 20 mars 1968, provoquera un choc psychologique majeur au sein de l’opinion internationale, contribuant grandement à la prise de conscience de la lutte du peuple palestinien pour la reconnaissance de son identité nationale.
Plusieurs dizaines de fedayin palestiniens, sous le commandement direct de Yasser Arafat présent dans le camp assailli, se laisseront ce jour là décimés sur place forçant l’armée israélienne à battre en retraite sous le regard impassible de l’armée jordanienne, demeurée durant la première phase de la bataille l’arme au pied dans la vallée du Jourdain.
La bataille d’Al Karameh tire son nom, par un curieux clin d’oeil du destin, du lieu de la localité d’Al Karameh, la bourgade où s‘est déroulée ce fait d’armes. Acte fondateur du combat palestinien sur le plan international, elle sera perçue et vécue comme «la bataille de la dignité retrouvée» en ce qu’elle lavera dans l’imaginaire arabe la traumatisante défaite de juin 1967, infligeant aux israéliens des pertes humaines plus importantes que celles subies sur le front jordanien un an plus tôt (1). Elle galvanisera longtemps la jeunesse arabe dans son combat politique et propulsera la lutte du peuple palestinien au sein de la jeunesse du Monde. Par sa portée symbolique, elle passera à la postérité pour l’équivalent palestinien de l’antique bataille des Thermopyles (2), en ce qu’elle signait par le sang et le sacrifice suprême l’esprit de résistance des palestiniens et leur détermination à prendre en main leur propre combat.
Publiée par la revue américaine, la photo du chef palestinien jusque là anonyme popularisera et le porte-parole de la cause palestinienne et le symbole de l’identité palestinienne. Elle précipitera la mise à l’écart de son calamiteux prédécesseur Ahmad Choukeiry et propulsera, dans le même temps, le Keffieh, la coiffe traditionnelle palestinienne, au rang de symbole universel de la révolution. Le Keffieh, à l’origine en damier noir et blanc, sera décliné depuis lors dans toutes les couleurs pour finir par devenir le point de ralliement de toutes les grandes manifestations de protestation à travers le monde de l’époque contemporaine.
«Tout cela était possible à cause de la jeunesse (…), d’être le point le plus lumineux parce que le plus aigu de la révolution, d’être photogénique quoi qu’on fasse, et peut-être de pressentir que cette féerie à contenu révolutionnaire serait d’ici peu saccagée: les Fedayine (les volontaires de la mort) ne voulaient pas le pouvoir, ils avaient la liberté», prophétisait déjà en ces termes l’écrivain français Jean Genêt, un de leur nombreux compagnons de route de l’époque, qu’il immortalisa dans son inoubliable reportage sur le massacre des camps palestiniens de Sabra-chatila, dans la banlieue de Beyrouth. (Cf. Jean Genêt «Quatre heures à Sabra-chatila», in Revue d’Etudes Palestiniennes, N° 6 Hiver 1983).
Dans une séquence historique arabe riche de personnalités charismatiques, (décennies 1960 -1970), Gamal Abdel Nasser (Egypte), Hafez Al-Assad (Syrie), Houari Boumediene (Algérie), Saddam Hussein (Irak), Faysal d’Arabie, beaucoup lui en tiendront rigueur de sa popularité et de son prestige. Israël, d’abord et toujours, constamment, sans répit, voudra neutraliser la charge explosive de la mystique révolutionnaire que le mouvement national palestinien véhiculait au sein du tiers monde.

Dans le camp arabe, le Roi de Jordanie, Hussein le Hachémite, s’appliquera en premier, en septembre 1970, à le mettre au pas dans un épouvantable bain de sang, le premier du supplice palestinien, alors que les autres pays arabes s‘emploieront à limiter sa marge de manœuvre, en infiltrant la centrale palestinienne, l’Organisation de Libération de la Palestine, de mouvements fantoches, désormais fossiles, à l’instar d’Al-Saika pro syrienne, du Front de Libération Arabe pro-irakien ou du Front de libération de la Palestine pro égyptien ou encore de la duplicité marocaine qui compensait un soutien affiché à la cause palestinienne par une collaboration souterraine avec les services marocains. De tous les grands pays arabes, seule l’Algérie accordera un soutien sans faille à la guérilla palestinienne, «Zaliman kana aw Mazloum», oppresseur qu’il soit ou opprimé, selon l’expression du président Boumediene (3).
La guerre d’octobre 1973 et la destruction des fortifications israéliennes de la ligne Bar lev, le long du Canal de Suez, mettront en sourdine les conflits interarabes donnant du répit à la guérilla palestinienne, dégageant la voie à l’envol de Yasser Arafat sur la scène internationale. Prenant par surprise New York au saut du lit, Yasser Arafat débarque le 13 novembre 1974 d’un avion spécial algérien dans la métropole américaine pour s’adresser, fait sans précédent dans les annales diplomatiques, devant l’assemblée générale des Nations unies, présidée à l’époque par le fringant ministre de affaires étrangères de Boumediene, Abdel Aziz Bouteflika.
Fraîchement sacré par ses pairs arabes porte-parole exclusif des Palestiniens, le chef de l’OLP plaide la cause de son peuple, inexistant juridiquement, et inaugure solennellement une stratégie combinant la lutte armée et l’action diplomatique – «le fusil et le rameau d’olivier», selon sa formule, pour retrouver une patrie, la Palestine, rayée depuis un quart de siècle de la géographie politique.
Dans ce discours répercuté depuis la plus grande ville juive du Monde jusqu’aux confins de la Péninsule arabique, le dirigeant palestinien, dix ans après la fondation de son mouvement au Caire, en 1964, évoque timidement la possibilité d’une coexistence judéo arabe. Arafat est au Zénith, secondé par la nouvelle puissance pétrolière arabe révélée par la guerre d’octobre 1973.
Dans la brèche ouverte par l’OLP, dix sept mouvements de libération africains se verront reconnaître le statut d’observateur à l’ONU. Cinq d’entre eux, ceux de Guinée portugaise, d’Angola, de Mozambique, de Zimbabwe notamment conduiront quelques années plus tard leur pays à l’indépendance.

L’euphorie sera de courte durée. Six mois après son sacre onusien, la guerre éclate à Beyrouth, sombre présage, le 13 avril 1975, dans la quinzaine qui voit la chute de Pnom-Penh et de Saigon, les deux bastions américains en Asie. A son corps défendant, Arafat s’y engouffre, puis inexorablement s’embourbe dans ce qui n‘était au départ qu’une guerre inter factionnelle et qui se transformera en première guerre civile urbaine de l’époque contemporaine. Les rebondissements de ce conflit à projection régionale et internationale vont faire voler en éclats, au fils de sept années (1975-1982), la cohésion libanaise, la cohabitation libano palestinienne et la solidarité arabe.
L’Egypte fait la paix avec Israël et l’Amérique se lie par la clause Kissinger, qui subordonne tout contact avec l’OLP à des conditions équivalant, selon les Palestiniens, à une capitulation sans condition. Happé par la tourmente, Arafat touchera le fond de l’abîme, en juin 1982, dans Beyrouth assiégée, devenue pour ses adversaires le «foyer du terrorisme international», et, pour ses sympathisants, le «vivier de l’opposition tiers-mondiste». Abandonné de tous, il assure avoir humé dans son ancien sanctuaire transformé en camp retranché les «senteurs du paradis» (Rawaeh al Janna), le pressentiment de l’au delà. Il quitte son fief de Beyrouth avec les honneurs de la guerre, mais, exsangue, son organisation, le plus important mouvement de libération du tiers monde, quasiment désarticulée.
Douze ans après le septembre noir jordanien (1970), où les bédouins du Roi hachémite s’étaient donnés à cœur joie contre les Fedayine palestiniens, les Israéliens se livrent, à leur tour, à une chasse aux Palestiniens, dans Beyrouth, haut lieu de la contestation arabe, assiégée sous le regard impavide des dirigeants arabes. Pour la deuxième fois de son existence, Yasser Arafat, au prix de prodiges diplomatiques et d’une résistivité à tout crin, se sort d’un siège militaire dans lequel voulaient l’enterrer ses ennemis
Fort du capital de sympathie qu’il a accumulé au cours des 65 jours de siège, il se lance alors à la quête d’une nouvelle consécration internationale. C’est la période de la diplomatie volante. Reçu en grande pompe par un aréopage de chefs d’état arabes à Fès (Maroc), puis par le pape Jean Paul II, le président italien Sandro Pertini, en septembre 1982, les pays d’Europe du Nord, le Sommet des non-alignés de New Delhi, en février mars 1983, il butte, à l’instigation des Etats-Unis, sur les réticences du noyau central de l’Europe occidental: la France, le Royaume Uni et la RFA, mus, selon les Palestiniens, par une sorte de «solidarité expiatoire» à l’égard d’Israël, lui refuseront un droit de cité.
Les Etats-Unis, meilleurs alliés d’Israël dans le Monde, paient le tribut le plus lourd de la radicalisation du Proche-orient. En deux ans, 1982-1984, l’ambassade des Etats-Unis à Beyrouth Ouest, le quartier général des Marines, puis la mission américaine dans le réduit chrétien, seront tour à tour balayés par des attentats meurtriers, la cellule Moyen-orient de la CIA décapitée, de même que le quartier général des Français, ainsi que le quartier général phalangiste des milices chrétiennes.
Dans le même temps, certains des principaux protagonistes de l’intervention israélienne disparaissaient de la scène publique: Alexander Haig, secrétaire d’état et son ami le premier ministre israélien Menahem Begin, le chef des milices chrétiennes libanaises, Bachir Gemayel, l’officier félon libanais pro israélien Saad Haddad, alors qu’Ariel Sharon, l’artisan de l’invasion du Liban, était contraint à la démission pour sa responsabilité dans les massacres des camps palestiniens de Sabra-chatila, en septembre 1982.
Les survivants de cette hécatombe politique – Arafat et le président syrien Hafez Al Assad, le grand vaincu de l’été 1982 revigoré par l’armement sophistiqué soviétique- se livrent alors à un impitoyable règlement de compte. La centrale palestinienne est secouée de forces centrifuges, amplifiées par les déboires de leur chef dans sa politique d’ouverture vers l’Occident et les pacifistes Israéliens, dont les massacres de Sabra-chatila, dans la banlieue sud de Beyrouth, en seront l’illustration tragique.
arafat beyrouth
Premier coup de semonce, Issam Sartawi, l’homme de l’ouverture pro-occidentale, est assassiné, puis, fait inconcevable à l’époque, deux des plus fidèles lieutenants d’Arafat -Abou Saleh et Abou Moussa- entrent en dissidence, plus grave encore, le chef de l’OLP, fait unique dans l’histoire, est expulsé de Syrie en juin 1983.
C’est la fêlure: les guérilleros se muent en desperados. Des Palestiniens portent les armes contre d’autres Palestiniens. Pour la troisième fois de son existence mouvementée, Arafat, comme il y a treize ans à Amman et l’année précédente à Beyrouth, est assiégé à Tripoli (Nord Liban), cette fois par les Syriens et les Israéliens.
Privé désormais de toute autonomie territoriale, il est sauvé in extremis, pour la deuxième fois en un an, par les Français agissant sous le couvert des Nations Unies. La presse internationale évoque le crépuscule du chef palestinien. Il réussit néanmoins au Sommet islamique de Casablanca à entrebâiller la porte du retour de l’Egypte dans le giron arabo-islamique d’où elle était exclue depuis cinq ans. De son exil de Tunis, à deux mille km du champ de bataille, il tente de recoller les morceaux de ce qui demeure le vecteur de la revendication nationale palestinienne.
Le président Assad ne décolère pas, malgré les bons offices de l’Algérie, du Sud Yémen et de l’Union soviétique. Par quatre fois cette année, Arafat est contraint, à l’automne 1984, de renoncer à convoquer le parlement palestinien en vue de se faire confirmer son leadership et éviter l’atrophie de la centrale palestinienne. Par crainte de scinder définitivement son mouvement, mais faute aussi de trouver l’hospitalité d’un pays pour y tenir ses assises. Une situation paradoxale pour un chef jadis incontesté d’une organisation reconnue par cent dix Etats. Paradoxale pour le symbole même de l’exil du peuple palestinien de se vouer à la recherche d’un refuge pour ses parlementaires en exil, cruelle ironie de l’histoire, illustration tragique du drame palestinien.
Amputé de ses deux principaux adjoints, Khalil Wazir, Abou Jihad, l’adjoint opérationnel sur le plan militaire, et, Abou Iyad, le responsable des renseignements, de son homme de confiance, Ali Hassan Salameh, officier de liaison auprès de la CIA, tous trois éliminés par les services israéliens pour tuer dans l’œuf tout dialogue entre Palestiniens et Américains,Yasser Arafat va faire l’objet d’un processus de diabolisation, qui débouchera quinze ans plus tard sur son confinement arbitraire sur ordre du boucher de Sabra-chatila, le général Ariel Sharon, sous le regard indifférent des pays occidentaux.
L’invasion du Koweït par l’Irak, en 1990, fera fondre sur lui le souffle du boulet. Plutôt que de se ranger dans un camp conte un autre et accentuer la division du Monde arabe, Arafat choisira d’endosser le rôle de médiateur entre Saddam Hussein et le Roi Fahd d’Arabie, talonné par l’Egyptien Hosni Moubarak trop heureux par son activisme belliqueux de restaurer le rôle moteur de l’Egypte sur la scène diplomatique arabe et justifier sa fonction de sous traitant régional de la diplomatie américaine.
Yasser Arafat sera mis au ban de la communauté arabe et internationale, plus précisément au ban de la coalition occidentale, l’alliance de vingt six pays occidentaux et arabes mise sur pied pour châtier Saddam de son outrecuidance à l’égard d’une principauté pétrolière, le Koweït. Il ne devra son salut qu’à l’accord israélo-palestinien d’Oslo conclu quasiment à l’insu des chancelleries occidentales.
L’homme, pour son audace, se verra gratifier du Prix Nobel de la paix, le 14 octobre1994, en compagnie des co-auteurs israéliens de l’accord d’Oslo, le premier ministre Itzhak Rabin et le ministre des affaires étrangères Shimon Pères. Conclu le 13 septembre 1993, l’accord d’Oslo devait conduire à l’autonomie de la bande de Gaza et la zone de Jéricho (Cisjordanie) avant de déboucher cinq ans plus tard sur la proclamation d’un Etat palestinien. Il ne tiendra pas un an.

II. La coupe jusqu’à la lie
En 1995, Benyamin Netanyahu, le chef de Likoud, nouveau premier ministre israélien, freinera l’application de l’accord avant de le vider complètement de sa substance dans l’indifférence des pays occidentaux. En toute impunité. C’est une nouvelle descente aux enfers pour Yasser Arafat dont le Nobel sera de peu de poids face aux avanies que les alliés occidentaux d’Israël vont lui infliger régulièrement.
Rien, absolument rien, ne sera épargné à celui que l’on a surnommé, parfois, à juste titre, «le plus célèbre rescapé politique de l’époque contemporaine», et ce prix Nobel de la Paix, un des rares arabes à se voir attribuer un tel titre, boira la coupe jusqu’ à la lie.
C’est ainsi qu’à l’occasion des cérémonies marquant le 50eme anniversaire de la fondation des Nations Unies, Yasser Arafat, fraîchement auréolé des accords israélo-palestiniens d’Oslo et du Nobel de la paix (1993), celui qui symbolise pour la grande majorité des siens la renaissance du peuple palestinien, le symbole de la revendication nationale palestinienne, va être rabroué d’une cérémonie à New York, fin octobre 1995, comme un vulgaire intrus.
Suprême infamie, l’interdit proviendra du sulfureux du Maire de New York, Rudolph William Louis Giuliani III, un italo-américain, au motif que les mains du dirigeant palestinien étaient souillées du sang d’américains. Comme si les américains n’avaient pas sur la conscience la mort de palestiniens. Comme si les américains n’avaient pas sur la conscience l’extermination des indiens d’Amérique, dont l’éradication a permis à ce fils d’immigrés italiens de prospérer à New York sur la terre de leurs ancêtres spoliés. Comme si des responsables américains n’avaient pas durant la Deuxième guerre mondiale, pour préparer le débarquement en Italie, pactisé avec la mafia d’origine italienne surchargée de sangs d’innocentes victimes américaines. Un autre dirigeant arabe, un chef fier, le président Soleimane Frangieh, débarquant à New York, en novembre 1974 pour parrainer la première grande campagne diplomatique de Yasser Arafat, avait eu droit à une fouille humiliante de la part de la brigade canine de l’office de lutte contre les stupéfiants. L’outrage fit du président libanais, le dirigeant politique arabe le plus résolument antiaméricain. Et cette tradition s’est perpétuée avec sa descendance.
Au vu de ces expériences, il parlait difficile de blâmer ceux qui, à l’habit diplomatique, continuent de préférer le treillis. Loin s’en faut qu’il s’agisse d’une simple coquetterie vestimentaire. Fidel Castro, par exemple. Le dirigeant cubain, un des derniers survivants de l’épopée révolutionnaire de l’après guerre, a eu droit à une ovation de douze minutes pour cinq minutes d’intervention devant l’assemble générale de l’ONU à l’occasion du 50 me anniversaire de la fondation de l’organisation internationale, alors que le président William Clinton, pour un discours de 17 minutes n’a eu droit, en cette circonstance, qu’à des applaudissements de circonstance.
La suite est connue et porte condamnation de l’Occident et de ses pratiques déshonorantes: la pression finale mise par Bill Clinton, en 1999, pour arracher un accord israélo-palestinien en vue de redorer la fin de son mandat éclaboussé par le scandale Monika Lewinsky. Décrié par ses ennemis, dénigré par ses faux frères arabes, Arafat, seul contre tous, face au déchaînement médiatique sur les prétendues offres généreuses de Ehud Barak, ne cédera pas, sur rien.
Deux ans plus tard, les attentats du 11 septembre 2001 contre les symboles de l’hyper puissance américaine mettent au goût du jour la thématique de la «guerre conte le terrorisme», une aubaine pour son implacable ennemi Ariel Sharon et son disciple américain George Bush qui diaboliseront à outrance Yasser Arafat pour en faire l’incarnation du mal absolu, quand bien même le commanditaire de l’opération, Oussama Ben Laden, le chef d’Al Qaïda, n’était autre que l’ancien sous traitant des américains, celui là même qui aura détourné vers l’Afghanistan des milliers de combattants musulmans pour faire la guerre aux soviétiques, les principaux alliés alors de Yasser Arafat du temps du siège de Beyrouth en 1982.
2003, l’invasion américaine de l’Irak offre à Ariel Sharon l’occasion de confiner Yasser Arafat dans sa résidence administrative, avec la complicité honteusement passive des pays occidentaux, et, toute honte bue, certaines des plumes les plus réputées du Monde arabe, tels des mercenaires de la presse, participeront à la curée.
Calfeutré dans sa luxueuse résidence londonienne à l’abri du risque et du besoin, Jihad el Khazen, le plus en vue des journalistes pétro monarchiques, directeur du journal «Al-Hayat» et caution palestinienne du journal saoudien, réclamera ainsi la démission non du boucher de ses compatriotes palestiniens de Sabra-chatila, le général Ariel Sharon, ou de son complice George Bush, du trublion libyen ou des gérontocrates du Golfe, tous les fossoyeurs de la cause nationale arabe, mais, paradoxalement, la démission de Yasser Arafat, le chef assiégé du mouvement palestinien, celui là même qui était alors à portée des fûts des canons des chars israéliens, le symbole de sa résistance nationale, la légende vivante du combat arabe.
Illustration pathologique de la décomposition mentale d’une fraction de l’élite intellectuelle arabe gangrenée par les pétrodollars monarchiques, sa prescription saugrenue est intervenue le 18 mai 2004 au lendemain de la destruction du camp palestinien de Rafah par l’aviation israélienne, moins d’un mois après les assassinats extrajudiciaires des chefs charismatiques du mouvement islamique palestinien Hamas, Cheikh Ahmad Yacine et Abdel Aziz Al-Rantissi. Elle lui vaudra de la part de l’étoile montante du journalisme arabe, l’éditorialiste vedette d’«Al-Qods Al-Arabi», Abdel Bari Atwane, un robuste rappel à l’ordre déontologique sur les règles élémentaires de la décence dans le combat politique.
arafat siege ramallah
Dix huit mois de réclusion n’entameront pourtant pas la volonté de résistance du chef palestinien, qui décédera le 11 novembre 2004, sans n’avoir cédé rien sur rien, sur aucun des droits fondamentaux de son peuple, pas plus sur le droit de disposer de Jérusalem comme capitale que sur le droit de retour de son peuple dans sa patrie d’origine. Mieux, comme un intersigne du destin, son bourreau, Ariel Sharon, sera réduit, treize mois plus tard, le 5 janvier 2006, à un état végétatif de mort-vivant, transformé en «légume» selon le jargon médical, plongé dans un coma, à l’image de sa politique belliciste.
Sa stature sans commune mesure avec son terne successeur, Mahmoud Abbas, un bureaucrate affairiste sans envergure, sans charisme, hante toujours la conscience occidentale, cinq ans après sa mort. Elle conduira les dirigeants occidentaux, sans crainte du ridicule, à de pathétiques contorsions: Hillary Clinton, Secrétaire d’Etat américain, en tournée au Moyen-Orient, de même que son prédécesseur républicain Condoleeza Rice, tel un rituel immuable, fleurissent régulièrement à chacun de leur passage à Beyrouth la tombe de Rafic Hariri, l’ancien premier ministre libanais assassiné, mais persistent à négliger à leur passage à Ramallah (Cisjordanie), le mausolée de Yasser Arafat. Il en est de même de Nicolas Sarkozy, autoproclamé «ami du peuple palestinien», qui contournera Ramallah, le siège du pouvoir légal palestinien, pour rencontrer Mahmoud Abbas à Jéricho, lors de son voyage en juin 2008. Comme si un Prix Nobel de la Paix palestinien constituait une monstruosité infamante, comme si le porte étendard de la revendication nationale palestinienne était pestiféré même au delà de la mort.
Qu’il est dérisoire de contourner sa conscience par un chemin de traverse. Pathétique de se voiler la face devant ses propres forfaitures: George Bush et Condoleeza Rice ont rejoint depuis belle lurette les oubliettes de l’histoire et leur compère Ariel Sharon a déserté depuis longtemps la mémoire des hommes, mais le mausolée de Yasser Arafat trône, lui, toujours devant le siège de l’autorité palestinienne, objet de l’hommage régulier de tout un peuple, comme une marque de gratitude indélébile à l’égard de son combat pour la renaissance de la nation palestinienne.

Au hit parade du leadership palestinien, Yasser Arafat pâtissait de l’aspect théâtral de certains de ses comportements, et sur ce créneau là, Abou Ammar était supplanté par deux personnalités aussi discrètes qu’efficaces: Georges Habbache, le charismatique dirigeant de l’organisation marxisante Front populaire de Libération de la Palestine, à la voix de stentor, d’une rigueur de vie exemplaire, le médecin des pauvres d’où son surnom «Al Hakim», l’ancien chef du mouvement nationaliste arabe, tombeur du protectorat britannique d’Aden (Yémen du sud), et Khalil Wazir, alias Abou Jihad, commandant en chef adjoint de la guérilla palestinienne, et, à ce titre, l’animateur clandestin de l’Intifada palestinienne.
Mais Yasser Arafat focalisera à lui seul la totalité de l’ostracisme israélo américain, concentrant sur sa personne les vexations infligées à travers lui au peuple palestinien, sans doute en raison du fait qu’il passera à la postérité pour avoir été l’homme sans lequel la Palestine aurait été rayée de la carte du monde.
L’implosion politique de Mahmoud Abbas, le 5 novembre 2009, à six jours de la commémoration décès de Yasser Arafat justifie a posteriori le scepticisme du chef historique des Palestiniens à l’égard des pays occidentaux et porte condamnation de la complaisance de son successeur à l’égard de la duplicité occidentale, en même temps qu’elle révèle la servilité de la diplomatie américaine et de son chef, Hillary Clinton, secrétaire d’état, à l’égard d’Israël.
Carbonisé par ses atermoiements dans l’affaire du rapport Goldstone sur Gaza et par la rebuffade américaine à propos des colonies de peuplement, la renonciation de Mahmoud Abbas à une nouvelle mandature présidentielle apparaît d’autant plus cruellement pathétique qu’elle s’est accompagnée d’une cinglante leçon de courage que lui ont asséné de jeunes palestiniens en opérant, non sans risque, une percée dans le mur d’apartheid à l’occasion de la commémoration du vingtième anniversaire de la chute du mur de Berlin, une action qui a retenti comme un camouflet à Mahmoud Abbas et à Israël , un défi à la léthargie des instances internationales, un cadeau posthume à Yasser Arafat, initiateur de la lutte armée palestinienne.
L’Etat palestinien qui se profile désormais inéluctablement à l’horizon, compensation au rabais des turpitudes occidentales à l’égard du peuple palestinien innocent, retentit aussi rétrospectivement comme le triomphe posthume de Yasser Arafat, un hommage rétroactif au combat du chef historique du mouvement national palestinien, un hommage au porteur du keffieh palestinien, le symbole de l’identité palestinienne, promu désormais au rang de symbole universel du combat contre l’oppression.

Références:
1– Au soir du 20 Mars 1968, l’armée israélienne attaque par surprise le camp palestinien installé dans la bourgade d’AL Karameh, dans la vallée du Jourdain, déclarée par Moshé Dayan, alors ministre de la Défense, «repaire du Fatah». Selon l’historien Benny Morris, les pertes israéliennes se sont élevées à 33 tués et 161 blessés. Sur le plan matériel, Israël enregistrera la perte de quatre chars de combat, 3 half-tracks, 2 voitures blindés ainsi qu’un avion, au cours de cette bataille qui aura duré 15 heures. Du côté palestinien, Kenneth Michael Pollack, ancien analyste de la CIA, estimera les pertes palestiniennes à 100 tués et 100 blessés, soit un tiers des combattants engagés tués ou blessés.
2- L’un des plus célèbres faits d’armes de l’histoire antique, la bataille des Thermopyles de 480 av. JC deviendra l’emblème de la résistance grecque à l’envahisseur, car malgré la prise d’Athènes par les Perses, les Grecs purent faire reconnaître leur indépendance, après leur triomphe à Salamine, le 22 septembre 480 av. JC. Trois cents spartiates commandés par le roi Léonidas Ier, prendront position à l’entrée du passage des Thermopyles, et combattront jusqu’au sacrifice, pour laisser aux Grecs le temps d’organiser leur défense. Au sommet du Kolonós, théâtre de l’ultime résistance spartiate, sur lequel fut érigé un mausolée, une inscription du poète Sémonide de Céos (556-467 av. JC), commémore cette action: «Étranger, va dire à Sparte qu’ici trois cents des siens sont morts pour obéir à ses lois».
3- Sur le rôle de l’Algérie: L’honneur de l’Algérie
Pour aller plus loin
Gilbert Achkar: Les Arabes et la Shoah, La guerre israélo-arabe des récits
Sindbadoctobre 2009 / 528 pages ISBN 978-2-7427-8242-0
Gilbert Achkar, professeur à la School of Oriental and African Studies (SOAS) de l’université de Londres.
Il est l’auteur, conjointement avec Noam Chomsky, de La Poudrière du Moyen-Orient (2007).

Source:www.renenaba.com

vendredi 6 novembre 2009

Tel-Aviv prépare une nouvelle guerre contre le Liban

Richard Labévière
Mercredi 4 novembre 2009

Après avoir écarté l’éventualité d’un bombardement de sites nucléaires iranien, l’état-major israélien privilégie des opérations « régionalisées ». Contrairement aux bombardements de l’été 2006, l’option terrestre est maintenant privilégiée. Celle-ci requiert l’engagement de quelque 120 000 fantassins, un grand déploiement d’artilleries et un millier de blindés. Les réservistes israéliens vivant en France et dans d’autres pays méditerranéens ont été, d’ores et déjà, mis en alerte. Ultrasecret, leur calendrier de retour en Israël s’étale du début novembre à la fin décembre. Dernièrement, les forces spéciales israéliennes, qui avaient échoué à s’implanter dans le Sud-Liban en août 2006, ont été réorganisées et sont engagées dans des programmes d’entraînement intensifs dans le secteur des fermes de Chebaa.

L’axe de pénétration de la première vague d’assaut emprunterait la Bekaa-Est, le long de la frontière syrienne avant de se scinder en deux fronts nord-est et sud-ouest. Cette opération ne vise pas une réoccupation durable du Liban-Sud, mais voudrait « casser le réarmement du Hezbollah et l’empêcher de déployer, à nouveau, des moyens militaires au sud du Litani », a expliqué le chef d’état-major israélien, Gabi Ashkenazi, à son homologue français, le général Jean-Louis Georgelin, le 4 octobre dernier à Paris.

Quelques heures auparavant, Ashkenazi s’était entretenu avec le chef des armées américaines, l’amiral Mullen, en villégiature en Normandie. Il a, bien sûr, été question du prochain exercice de défense israélo-américain « Junifer Cobra », prévu à la fin octobre. Ces manœuvres antimissiles doivent permettre de tester les systèmes antimissiles Hetz (Arrow), Thaad (haute altitude), PAC-3 et le dispositif AEGIS, impliquant la marine et l’aéronavale. D’autres manœuvres « Junifer Cobra » de même type ont déjà eu lieu ces cinq dernières années, mais cette nouvelle édition devrait engager - pour la première fois - des missiles intercepteurs et un nouveau système radar.

L’escapade française d’Ashkenazi, qui a duré moins de douze heures, a largement été commentée dans la presse israélienne après avoir « fuité » par un porte-parole de l’armée. Israël a voulu faire savoir qu’il abandonne temporairement l’option d’un raid aérien sur des objectifs nucléaires iraniens. A son retour, Ashkenazi a répété à la radio militaire que « la meilleure façon de lutter contre le nucléaire iranien consiste à imposer des sanctions », ajoutant que, si elles échouent, « Israël aura parfaitement le droit de se défendre avec tous les moyens nécessaires ».

Une nouvelle guerre contre le Liban s’inscrit, dès maintenant, dans cette rhétorique des « moyens nécessaires » qui comprennent aussi la répétition toujours possible de l’opération « Plomb durci » contre Gaza en janvier 2009. Toutefois, cette dernière hypothèse ne présente ni un caractère d’urgence politique, ni la garantie de pouvoir changer la donne stratégique régionale. Par contre, une nouvelle guerre contre le Liban aurait la préférence du cabinet israélien pour trois raisons. Premièrement : l’armée israélienne veut sa revanche sur le Hezbollah après le fiasco de sa guerre ratée de l’été 2006. Deuxièmement, Tel-Aviv essaiera de la vendre à ses alliés comme une nouvelle opération de police régionale susceptible de renforcer la stabilité du Liban. Troisièmement, et là réside sa dimension essentielle : en s’en prenant de nouveau au Hezbollah, Tel-Aviv envoie un signal à Téhéran et Damas qui soutiennent l’organisation politico-militaire libanaise.

Cette planification militaire correspond à une période « intermédiaire », commentent plusieurs sources du Département d’Etat alors que des pourparlers secrets se dérouleraient entre Israéliens et Palestiniens afin de préparer un « Oslo II ». Cette négociation de « haut niveau » se déroulerait depuis septembre dernier sur le territoire des Etats-Unis. Elle constituerait la raison principale pour laquelle le président palestinien, Mahmoud Abbass, a accepté - à la demande des Etats-Unis - le report en mars du vote d’une résolution du Conseil des droits de l’homme des Nations-Unies sur le rapport du juge sud-africain Richard Goldstone accusant Israël de « crimes de guerre » durant son offensive contre Gaza durant l’hiver 2008/2009.

Dans ce contexte, plusieurs sources du Département d’Etat américain estiment qu’une nouvelle guerre israélienne « défensive » contre le Liban pourrait favoriser le lancement d’« Oslo II », la grande initiative attendue de l’administration Obama. Doublement confronté à un redéploiement difficile de ses troupes en Iraq et à un choix stratégique capital d’augmentation ou de stagnation de ses effectifs et matériels en Afghanistan, le gouvernement du nouveau prix Nobel de la paix a impérativement besoin d’une relance de quelques négociations israélo-palestiniennes.

Même si l’on sait que le gouvernement Netanyahu s’est clairement prononcé contre un Etat palestinien et pour une continuation sine die de la colonisation, même si l’on sait que le Sénat américain n’est pas prêt à forcer l’Etat hébreu à faire des concessions significatives à la partie palestinienne, la grande presse internationale pourra enfin reparler d’un « processus de paix ». Refaire de la communication à partir d’un tel processus, même si celui-ci s’abîme de nouveau dans le simulacre, constitue désormais la priorité de Washington et de Tel-Aviv. Une fois encore, le Liban risque de servir de champ d’expérimentation à un marché de dupes.

Droits de reproduction et de diffusion réservés. © AL-AHRAM Hebdo
Publié le 4 novembre 2009 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo

jeudi 5 novembre 2009

L'Assemblée générale approuve le rapport Goldstone sur Gaza


Scène de destruction à Gaza.

5 novembre 2009 – L'Assemblée générale de l'ONU a adopté jeudi une résolution dans laquelle elle approuve les recommandations du Rapport Goldstone sur le conflit à Gaza, qui estime que des crimes de guerre ont été commis à la fois par Israël et les Palestiniens lors de ce conflit entre décembre 2008 et janvier 2009.
La résolution a été adoptée par 114 voix pour, 18 voix contre, et 44 abstentions, a indiqué le Président de l'Assemblée générale, Ali Treki. « Ce vote est une déclaration importante contre l'impunité. C'est un appel en faveur de la justice », a-t-il dit lors d'un point de presse à l'issue du vote.

« Sans justice, il ne peut y avoir de progrès vers la paix. Un être humain devrait être traité comme un être humain sans tenir compte de sa religion, de sa race ou de sa nationalité. Toutes les parties concernées devraient maintenant consacrer leurs efforts pour mettre en œuvre cette résolution », a-t-il ajouté.
Dans sa résolution, l'Assemblée générale demande au Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, de transmettre le Rapport Goldstone au Conseil de sécurité. Elle appelle également le gouvernement d'Israël et les Palestiniens à prendre les mesures appropriées dans les trois mois à venir pour mener des enquêtes qui soient indépendantes, crédibles et conformes au standards internationaux concernant les violations du droit international et des droits de l'homme signalées dans le rapport.

Le rapport de la Mission d'établissement des faits dirigée par le Juge Richard Goldstone, un ancien procureur au Tribunal pénal international sur l'ex-Yougoslavie (TPIY) et au Tribunal sur le Rwanda (TPIR), avait été adopté le 16 octobre par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, qui l'avait ensuite transmis à l'Assemblée générale.
Le rapport a mis en lumière un certain nombre de cas concrets de violations des droits de l'homme et du droit international imputables à l'armée israélienne et au mouvement palestinien Hamas dans le territoire de Gaza. Il recommande que le Conseil de sécurité se saisisse de la question et intime aux parties l'ouverture d'enquêtes, à défaut de quoi, dans les six mois, le Conseil devrait référer la situation à la Cour pénale internationale (CPI).
http://www.un.org/News/fr-press/docs/2009/AG10883.doc.htm

Entretien avec la militante palestinienne Leïla Khaled

Leila Khaled est devenue une icone de la lutte palestinienne en 1969, lorsqu’à 24 ans, elle faisait partie du dispositif du Front Populaire de Libération de la Palestine qui a planifié le détournement d’un Boeing 707, le premier d’une série d’actions d’envergure destinées à mettre les Palestiniens sur la carte politique. Elle faisait partie du groupe qui a détourné le vol TWA Los Angeles-Tel Aviv en 1969 après être monté dans l’avion pendant une escale à Rome et l’avoir contraint à se rendre à Damas, où ils ont fait évacuer les 116 personnes présentes à bord du Boeing qu’ils ont fait ensuite sauter.



Elle a participé ensuite à une tentative de détournement d’un vol El Al Amsterdam-New York l’année suivante, mais a été arrêtée et remise à la police britannique après que le vol soit dérouté sur Londres. Elle a été libérée le 1er octobre 1970 lors d’un échange de prison de prisonniers.
"Héroïne de la guérilla”, comme l’a appelé le Time Magazine en 1970, Khaled a été chassée de sa maison d’Haifa lors de la création d’Israël. Elle est restée un dirigeant de premier plan de la gauche palestinienne, et une porte-parole déterminée de la lutte pour les droits palestiniens.

Elle répond aux questions d’IPS depuis sa maison, à Amman.

IPS : Peut-être pouvons-nous commencer par le Rapport Goldstone sur l’invasion à Gaza, et en particulier sur les retombées politiques du rôle de Mahmoud Abbas dans le retard du débat sur le rapport à Genève.


Leila Khaled : Nous avons déclaré que c’était une erreur politique – une grosse erreur. Ce n’est pas seulement une erreur tactique. Nous avons demandé une enquête complète. Qui a donné les ordres de report du débat ? C’est un rapport des Nations Unies. Il a fallu des mois pour le finaliser. Nous aurions dû l’accepter directement, parce qu’il dénonce l’invasion et tous les actes qui en ont résulté – au point qu’Israël devrait être présenté devant la Cour Pénale Internationale pour inculper les criminels de guerre, que ce soit au niveau politique ou militaire.

IPS : Quelle est votre réaction à l’invasion de Gaza en général ?


LK : Ce n’est pas nouveau. Ce n’est pas la première fois. Mais aujourd’hui, nous avons une opportunité d’inculper les criminels de guerre.

IPS : Au sujet du conflit entre le Fatah et le Hamas, quelle est votre réaction sur ce qui s’est passé à Gaza en 2007, mais aussi sur ce qui s’est passé en Cisjordanie sous Fayyad et Abbas ?


LK : C’est une situation très grave, parce que les Palestiniens sont toujours sous occupation. Notre peuple est sous siège à Gaza. A Ramallah, l’Autorité Palestinienne n’a aucune souveraineté, ni sur la terre ni sur les frontières. Les Israéliens continuent de confisquer les terres, de démolir les maisons, d’arrêter les gens n’importe quand et n’importe où.


Une division entre Palestiniens, d’un point de vue politique, entrave notre capacité à relever tous ces défis des Israéliens. Nous et d’autres appelons à la réconciliation entre ces deux factions parce que la division ne va pas dans l’intérêt de notre peuple. Elle a affaibli les Palestiniens vis-à-vis d’Israël, et elle a aussi affaibli la solidarité avec les droits humains palestiniens au niveau international.
Nous la considérons comme une catastrophe.


IPS : Pensez-vous que l’élection du Hamas en 2006 lui a donné la légitimité de traiter la contestation à Gaza d’Abbas et de Dahlan et le projet israélien de le renverser ? Chaque bord accuse l’autre de coup d’Etat. Qu’en pensez-vous ?


LK : Nous ne pensons pas que le Hamas ait utilisé sa légitimité de la bonne façon. Ils ont eu la majorité aux élections, mais ils n’auraient pas dû aller jusqu’à résoudre les contradictions entre eux et le Fatah par les armes. Cela n’a rien amélioré pour les Palestiniens. Gaza est toujours sous siège. Et pendant ce temps, ils ont laissé l’Autorité Palestinienne faire ce qu’elle voulait en Cisjordanie.
Ils auraient pu se servir du dialogue et de davantage de discussions sur les différents problèmes, les négociations. Cela aurait montré à la société que nous sommes un peuple démocratique. Dans notre histoire, nous avons toujours eu des divergences, des visions différentes, mais n’avons jamais eu recours aux armes. La contradiction principale est avec l’occupation, pas entre nous.


IPS : Le général U.S. Keith Dayton entraîne une force palestinienne de sécurité qui vise ouvertement le Hamas, mais aussi le Front Populaire. Comment voyez-vous ces contradictions à la lumière de cette situation ?


LK : Le plan Dayton met sur pied un appareil non pas pour défendre notre peuple, mais pour empêcher notre peuple de résister. Ce qui veut dire non seulement l’entraînement, mais aussi la traque de toutes les cellules de la résistance – de toutes les factions, pas seulement le Hamas. Pendant ce temps, tous les jours, Israël entre dans les villes, arrête les gens, les assassine. Au lieu de cela, l’Autorité Palestinienne devrait renforcer ceux qui sont prêts à résister. Malheureusement, c’est l’une des principales contradictions au niveau palestinien : l’Autorité Palestinienne, le gouvernement, ou l’appareil sécuritaire ou la police sont construits selon la vision Dayton, et non au bénéfice de notre peuple.


IPS : Comment voyez-vous la prochaine intifada qui se profile ? Avec le mur encerclant les communautés palestiniennes, avec les forces de sécurité entraînées par Dayton, beaucoup en Cisjordanie voient que toute forme de résistance à Israël se heurte à ce projet. Est-ce la création d’un paradigme où la prochaine intifada serait contre l’Autorité Palestinienne ?


LK : Toute intifada a ses raisons objectives. La situation n’est pas suffisamment mûre pour une troisième intifada, avec toute cette pression contre notre peuple, qu’elle vienne du côté palestinien ou du côté israélien.
Les gens se sont rendus compte qu’après la première et la deuxième intifada, ils avaient fait beaucoup de sacrifices, celui de leurs familles, de leurs maisons, de leurs enfants, qu’ils soient martyrs ou prisonniers. Nous avons actuellement 11.000 prisonniers dans les prisons israéliennes. Derrière eux, il y a 11.000 familles. Je pense que nous devons commencer par mettre fin à cette division. Cela donnera plus de pouvoir à notre peuple. Nous avons vu, au moment de l’invasion de Gaza, que les manifestations étaient réprimées par la police palestinienne, pas par la police israélienne. Je ne pense pourtant pas qu’une intifada soit proche.


IPS : Où en est le Front Populaire en particulier et la gauche en général, en ce moment, en particulier dans la division entre le Hamas et le Fatah ? La gauche est à l’évidence à un de ses niveaux le plus bas dans l’histoire du mouvement national.


LK : Je pense que les Accords d’Oslo ont été un tournant dans la lutte palestinienne. Une partie de notre peuple en Palestine a soutenu les négociations avec les Israéliens. Ils pensaient qu’ils leur apporteraient l’indépendance, un Etat national. Mais après des années (à ne rien obtenir), les gens ont réalisé qu’ils ne leur apportaient rien. C’est la raison pour laquelle la deuxième intifada a éclaté.
La gauche a été affectée par ce qui s’est passé, et elle est affaiblie par ses divisions. Nous avons essayé pendant des années de bâtir un seul front de gauche, pas en tant que parti, mais comme un front avec un programme politique et une résistance unifiés.

Nous avons le sentiment que si nous réussissions, cela créerait une troisième ligne. Dans les médias, on n’entend parler que du Fatah et du Hamas, mais en fait, ce n’est pas comme ça. Et ça affaiblit la situation toute entière.


Au sujet du Front Populaire, il fait face à de nombreux défis. Notre secrétaire général, Abu Ali Mustafa, a été assassiné. Ahmed Sa’adat est en prison. Beaucoup de nos cadres ont été arrêtés. Beaucoup ont été tués par les Israéliens. Des centaines de nos cadres et membres sont en prison. Tout ceci affaiblit le Front Populaire.


IPS : J’ai discuté de cette question avec le secrétaire général Ahmed Sa'adat en 2003. Il m’a parlé d’Israël se servant de l’intifada pour se centrer immédiatement sur le FPLP, pour casser les reins de l’organisation par les assassinats et les arrestations. Non seulement parce qu’il voyait le FPLP comme une menace historique, mais aussi parce qu’il avait été tellement affaibli par le climat politique tout au long des années 1990 – tant localement que globalement.


LK : Abu Ali Mustafa a été assassiné parce qu’il a déclaré que le FPLP était là pour résister et pas pour compromettre nos droits. Ca, les Israéliens l’ont très bien compris. Ce fut la première fois que les Israéliens ont assassiné une personnalité politique comme Abu Ali Mustafa.
Les Israéliens savaient très bien que le FPLP était dans une position de résistance. Qu’il avait son programme de résistance, ce qui signifiait qu’ils n’allaient pas chercher à négocier. Ils savaient que soit en assassinant, soit en arrêtant la direction, ils affaibliraient le FPLP, et ils l’ont fait. Mais nous pouvons aussi nous reconstruire, et nous avons encore beaucoup à faire.
Mais la situation générale n’est pas, elle non plus, avec la résistance – au niveau palestinien, mais surtout au niveau arabe. Ceci affaiblit la situation globale, pas seulement le Front Populaire.

IPS : Je me demande si nous pouvons parler un peu de la trajectoire de la lutte palestinienne armée : quelles sont les possibilités et les limites de la lutte armée, avec le mur et le paradigme du nouveau ghetto ?


LK : En général, les gens trouvent toujours les moyens de résister. Après 1967, nous avons utilisé les détournements d’avion. Puis notre peuple s’est servi des pierres pour exprimer sa résistance, puis ce qu’on appelle les attentats-suicide, qui ont cessé. Puis les roquettes depuis Gaza, parce que les Israéliens sont partis et qu’il y avait de nouveaux espaces, alors qu’en Cisjordanie, elle est réduite au silence.
Vous avez utilisé le terme de « ghetto » - oui, nos villes sont comme des ghettos aujourd’hui. Elles sont encerclées par des colonies, par le mur, à toutes les entrées des villes, nous avons des checkpoints.
Mais les gens trouveront les moyens de leur résistance, auxquels je ne pense pas moi-même. Personne n’avait pensé à une intifada des pierres, que les enfants les utiliseraient eux aussi. Cela a provoqué beaucoup de critiques contre Israël, et davantage de solidarité avec les Palestiniens. Donc, par tous les moyens. Où il y a occupation, il y a toujours résistance. Chaque fois, cette résistance a sa propre forme et ses propres moyens. Je pense que la situation d’accalmie ne durera pas. Notre peuple a une très longue expérience de lutte et ne peut pas accepter que cette situation perdure. Un jour, ça éclatera à nouveau. De quelle manière, je ne peux le dire. Mais ça viendra.
Source: ISM /